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Stéphane Rousseau : Brise la Glace

Bulletin météo : L’hiver sera rude avec neige abondante dans la vallée, bourrasques fréquentes  force 14 (pour les non-initiés ou pour ceux qui ont le vertige l’échelle de Beaufort ne comporte que 13 échelons, c’est dire si va souffler sévère !), et de fortes gelées sont prévues en plaine. Pas de panique, Stéphane Rousseau « Brise la glace » (je ne suis pas très fier de celle-là mais j’assume !).

Après «Les confessions de Rousseau», « Brise la Glace » est son sixième anticyclone, véritable remède aux dépressions hivernales. Poussé par des vents d’ouest le comédien est accompagné par Emmanuelle Caplette à la batterie et William Croft aux claviers/guitares qui font monter la température au gré des alizés québécoise exhalées par Monsieur Rousseau.

Switch Agency
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Cette fois en mode stand up c’est donc sans sketch et sans filet que le comédien se met à nu (au sens figuré les filles !) et évoque son existence tout en autodérision: l’âge, l’amour, les enfants bref la vie de son cœur de cible. Cet égoïste, egocentrique, alcoolique comme il se décrit lui-même émeut même un peu lorsqu’il ranime son chagrin d’amour suite au départ de sa femme (de ménage) de 17 ans (sa cadette). Il reprend vite le dessus lorsqu’il tente de nous faire croire qu’il ne sait pas séduire lui qui a toujours été dragué.

La chaleur monte d’un cran lorsque Stéphane Rousseau ondule en danse contemporaine ou se lance dans ses vocalises qui, depuis le début de sa carrière, ont fait sa réputation. Quelques imitations, notamment d’une Isabelle (Garou) Boulay, comment dire, pour le moins orageuse, nettoieront l’atmosphère. El Niño et le sirocco chasseront définitivement les derniers cumulonimbus (j’adore ce mot !) au moment où l’ouragan Rico Chico entamera sa danse de l’amour.

Première tournée d’Adieu, « Brise la Glace » sera le dernier spectacle de Stéphane Rousseau avant longtemps (au moins jusqu’au prochain) alors ne ratez pas ce phénomène climatique à tendance très show.

 « Stéphane Rousseau brise la glace », jusqu’au 10 janvier au Théâtre du Palais-Royal, 38 Rue de Montpensier (1er arrondissement, Paris), du mardi au samedi Plus d’informations et réservations sur www.theatrepalaisroyal.com




José Rodrigues dos Santos : du Big Bang au Big Crunch

Souhaitant découvrir les secrets de l’univers mais n’ayant qu’un été pour le faire, pas que la fin du monde soit proche mais je ne consacre que peu de temps aux choses accessoires, je m’orientais vers l’auteur en vogue du moment et spécialiste du sujet : José Rodrigues dos Santos et son best-seller à 2 millions d’exemplaires : La formule de Dieu. Puis, pris par l’enthousiasme vers La clé de Salomon du même auteur.

Du Big Bang au Big Crunch. En effet, autant La formule de Dieu vous transporte littéralement mêlant espionnage, romantisme et physique quantique, autant La clé de Salomon vous laisse un goût amer comme lorsque vous vous êtes fait pigeonner au bonneteau sur le pont d’Iéna (toute ressemblance avec des faits réels est purement volontaire).

 

La formule de Dieu - HC Editions
La formule de Dieu – HC Editions

Grand 1 petit tas : La formule de Dieu donc, un professeur d’histoire spécialiste en cryptologie…, euh ? Hein ? Comment ? Que lis-je ? Oui, un professeur d’histoire spécialiste en cryptologie au Portugal. Ah !!! On a eu peur ! On a frôlé le plagiat avec l’autre là, mais si, le professeur d’histoire avec sa montre Mickey, spécialiste en symbologie mais à Harvard, lui (voir mon article sur Inferno) ! Bon, je reprends, Robert Langdon, oups pardon ! Tomàs Noronha est invité par le gouvernement iranien à décrypter un manuscrit dont l’auteur ne serait autre qu’Albert Einstein, il est très vite contacté par la CIA pour devenir un agent double (portugais !). D’aventure en aventure, de ville en ville, Tomàs fera une découverte fondamentale qui changera comme d’habitude la face du monde.

Le bonus de ce livre par rapport au genre roman historique est l’interprétation des découvertes scientifiques, toutes fondées, et notamment sur la physique quantique. On en en sort plus instruit qu’on en est entré (merci de fermer la porte en sortant, ça fait courant d’air). Le récit est parfaitement équilibré et on se laisse docilement porté même si, parfois, quelques raccourcis trop audacieux nous replongent dans la réalité.

La clé de Salomon - HC Editions
La clé de Salomon – HC Editions

Grand Dieu, petit dé : La clé de Salomon est le cinquième livre de la série Tomàs Noronha et le troisième publié en France*. Fort de son succès, José (Rodrigues dos Santos) rebondit sur les mêmes ressorts (chtoing-chtoing) : meurtres, enquêtes, mystères, sciences. Sauf que, comme me l’avait enseigné un grand maître tibétain sur les contreforts de l’Hymala… des Vosges, vêtu de sa tunique orange (ou corail pour les fashionistas) : « Tu peux remplacer les lardons par du saumon fumé, une quiche reste une quiche ». Sûrement trop jeune à l’époque, je n’avais pas perçu la profondeur ou la portée d’une telle réflexion et voyant ma bouche grande ouverte et l’écume baveuse qui en sortait, mon maître en avait arrêté là de ses enseignements philosophico-culinaires. C’est donc pendant la lecture de ce livre, que, la révélation me caressa de sa douce chaleur et m’envahit de son halo bleuté, sauf que là, José, t’as oublié la crème fraîche !

Ça manque de liant, c’est fade, l’addition est salée. A trop vouloir nous resservir le même plat l’auteur a oublié la qualité du service. Quelques exemples : il ne m’arrive pas (ou rarement) d’être poursuivi par une bande de tueurs à la solde de la CIA mais il ne me viendrait pas à l’idée, dans de tels cas, de m’enfermer dans une université et de prendre 2 heures pour expliquer à ma copine le concept des ondes et des particules de lumière, tout ça pour impressionner la dame (et le lecteur qui n’en demandait pas tant) mais peut-être suis-je trop terre à terre ? Idem, alors que cette même copine n’a plus que 20 minutes avant de mourir dans d’atroces souffrances, d’expliquer aux directeurs de la CIA (ceux qui voulaient ma perte 24 heures plus tôt), la théorie du Tout, mais peut-être suis-je trop romantique ? Bref, il ne suffit pas de trouver un filon encore faut-il savoir l’exploiter (foi de chercheur d’or).

Au-delà d’une intrigue bâclée l’auteur s’inspire largement du Symbole perdu (titre original : « The Solomon Key », si si je n’invente rien !) qui est loin d’être mon préféré ayant déjà, à l’époque, reproché à Dan (Brown) d’avoir céder à la facilité littéraire et aux sirènes du mercantilisme après le succès du Da Vinci Code.

A bon détendeur, salut.

 

* La Clé Salomon est le troisième de la série paru en France après La formule de Dieu et L’ultime secret du Christ.

 

La formule de Dieu (José Rodrigues dos Santos)
HC Editions
ISBN : 2357201134
 
La clé de Salomon (José Rodrigues dos Santos)
HC Editions
ISBN : 2357201762



Les Nombrils – Voyage hilarant en égotisme

Trop souvent ignoré, délaissé, voire pire, torturé, nous devrions tous avoir une pensée émue pour notre nombril, voilà pour moi c’est fait… Évidement le sujet de ce billet n’est pas notre petite cicatrice située sur l’abdomen, résultat de la coupe du cordon ombilical, mais de la pièce Les Nombrils actuellement au théâtre Michel.

Après s’être caressé le ventre, vient tout de suite en tête le syndrome de l’ego surdimensionné, dit le melon, et c’est bien le thème de cette pièce truculente et hilarante : une troupe de quatre comédiens égotiste au talent plus que discutable dirigée par un metteur en scène souhaitant interloquer le spectateur par une approche révolutionnaire du théâtre. cinq personnages donc, rejoints très vite par un sixième jouant tous les différents hôteliers rencontrés pendant leur tournée provinciale.

Le regard lointain, la main sur le cœur, la voix calée en mode vibrato, ces pseudos acteurs essaient tant bien que mal de jouer une pièce incompréhensible qu’un Shakespeare de boulevard sous LSD, promenant sa collerette dans les plaines de Kiev, aurait pu écrire dans un moment de grande détresse personnelle.

Il y a tout d’abord la grande actrice à la carrière longue comme le bras d’un bébé Hobbit qui a connu son heure de gloire dans une pub pour de la farine, le comédien à l’haleine douteuse qui ne cesse de dépiler son CV empli de films que personne n’a jamais vus, le jeune apprenti de 40 ans dont le talent n’a été repéré que par sa maman, et l’ingénue qui hésite entre le théâtre, le doublage de films pornos et le pole dance. Leurs égos sont mis à mal par l’abandon de leur producteur qui devait financer cette tragédie russe jusqu’au graal ultime : le festival d’Avignon !, mais également par les réceptionnistes des hôtels de seconde zone notamment par un Corse qui imposera sa vision de la pièce à la sauce indépendantiste. Le metteur en scène, dépassé par autant de talent concentré, se démène dans tout cela pour imposer sa vision myope d’un théâtre du futur.

 

crédit photo : Franck Harscouet
Crédit Photo : Franck Harscouet

En plus d’un pitch original qu’est-ce qui fait que la pièce Les Nombrils soit si réussit ? Tout d’abord le texte, en effet, l’écriture est ciselée et précise, les répliques fusent et font mouches :

« Il y a tellement de noms d’oiseaux qui volent au-dessus de ma tête qu’il y en a bien un qui va me chier dessus ! » du Audiard en somme !

Ensuite, l’interprétation, il faut beaucoup de talent pour se faire ainsi maltraité dans cette autodérision permanente et chaque personnage, pris individuellement, peut même émouvoir.

Assurément un des succès de cette seconde partie d’année et alors que la pièce fictive n’attire qu’une vingtaine de spectateurs au début des représentations (beaucoup moins à la fin), cette parodie allèche le badauds tant les fous rires sont nombreux et bruyants.

Un conseil, ne vous couvrez pas trop, il fait très vite chaud.

« Les Nombrils », actuellement au théâtre Michel (8e arrondissement), du mardi au samedi à 21h et en matinée le samedi à 17 h 30. Plus d’informations sur http://lesnombrils-lapiece.fr.




Deconnexion – Le Film

Je suis en pleine dépression, ma box reste bloquée en étape 3, le « chenillard » me nargue, tourne en rond depuis 48 heures, l’assistance téléphonique m’assure que mon appel va être pris en compte dans moins de 1 250 minutes, je dois réserver mes billets d’avion, payer mes impôts, mes amendes, consulter mes comptes…. Arrgrrhhh  je craque et …. Je me réveille. Non tout va bien, l’heure est bien affichée, 06h32, mon débit internet est rapide, mon pouls revient à la normale, je revis. Il devait s’agir d’une réminiscence de la projection du court métrage Déconnexionfisheye

Dans une chambre au décor post apocalyptique résultat de la rencontre entre Valérie Damidot et Marc-Emmanuel, Théo trentenaire pré-pubère n’a qu’une obsession : rester connecté à son monde virtuel, être le roi en son royaume, pouvoir le maîtriser, mais il en est qu’esclave. Echanges de mails, de SMS, de tchats, ponctués de LOL qui prendront tout leur sens à la fin. Théo joue, ment à Léa sa petite amie, dévore pizzas Gang Bang et sites pornos 4 fromages, puis son beauf Tristan l’appel…

Jérémie Prigent et François Rémond auraient pu réaliser un documentaire de trois heures avec témoins floutés et voix off au ton grave sur la dépendance au web et ses effets secondaires, mais ils ont pris le parti d’un court métrage totalement décalé de 13 minutes. Financé via le site participatif KissKissBankBank [dont 90% consacré à ma rétribution pour l’écriture de cet article (c’est que j’ai des frais merde !)]. Ce court métrage à la réalisation soignée et pointue ne laisse place à aucune imperfection, le moindre détail a son importance et plusieurs projections seront nécessaires pour en percevoir les différents niveaux. Vous l’aurez compris le second degré est le fil conducteur de cette production millimétrée. Une mention spéciale pour les participations de Jean-Claude Dreyfus que l’on retrouve avec bonheur dans ce rôle cynique et Allyson Glado dont la tirade (entre autre) restera à jamais gravée dans ma mémoire.

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Après tout ça, je retourne à mes travers, mon compte Facebook, check mes tweets, mate les photos sur Instagram, rafraichi mes 18 boites mails, tombe sur un message d’Aurélia de Côte d’Ivoire, raide dingue de moi, m’assure qu’elle m’aime d’amour contre 15 000 € , ou de Guillaume qui me propose des pilules pour gagner 2 cm minimum, c’est que je n’étais pas complexé jusque-là, mais heu !  Quoi ? Comment ? D’ailleurs je ne connais pas de Guillaume et puis y paraît que ce n’est pas la taille qui compte, c’est un « court-métrage ».

Bande Annonce – Deconnexion

Titre : Déconnexion
Court métrage (2014), durée : 13 minutes
Sélectionné au festival Eiddolon (Lens) et au festival international de Binic (Côtes d’Armor)

Prochaine projection : lundi 14 avril 2014 au bar Le Paname (Paris 11ème)

Réalisation : Jérémie Prigent et François Rémond
Scénario et dialogues : Jérémie Prigent

Production : Southwind Productions / Ataraxie Productions

Distribution : Nicolas Ullmann (Théo), Dounia Coesens (Léa), Baptiste Lorber (Tristan), Anna Polina (Anna), Jean-Claude Dreyfus (Vendeur de chiens), Allyson Glado (Petra), Karleine (Irina).

Site : www.deconnexion-lefilm.com
Facebook : https://www.facebook.com/deconnexion.lefilm?fref=ts

 

 




Spamalot, c’est Graal docteur ?

Prenez une coupette âgée de 2000 ans, un PEF* au meilleur de sa forme, le film « Sacré Graal », secouez le tout et vous obtenez SPAMALOT à Bobino ou L’adaptation française de la comédie musicale anglaise du même nom, inspirée du film des Monty Python, déjà montée par le même déjanté PEF en 2010, vous suivez ? Vous en voulez encore ? Alors je synthétise : SPAMALOT c’est 18 comédiens, 46 personnages, 180 costumes, plus de 2h de fous rires et un lapin carnivore.

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L’ex-Robin des Bois, fort de son dernier succès cinématographique avec « Les Profs », revêt de nouveau ses collants, sa cotte de maille et arbore une épée flamboyante (au sens propre), entouré par une cour de seconds rôles qui n’ont de second que le nom. En effet, PEF sait s’effacer au profit de ses preux chevaliers, notamment Galahad (ce soir-là Florent Peyre) blond platine hilarant ou d’une dame du Lac tantôt sexy, tantôt acariâtre en mal de notoriété. Même si la table est ronde, les répliques sont saillantes, la légende Arthurienne prend un « sacré » coup et le public en redemande, rien n’est épargné, pas même Monsieur Pokora, c’est dire !

Qui dit comédie musicale dit musical : chaque scène est enrobée avec plaisir et talent par des chanteurs, qui feraient rougir une Céline Dion de fin de tournée, et des danseurs, qui feraient passer « Danse avec les stars » pour une kermesse d’école communale (attention, j’ai une très grande tendresse pour les kermesses !). Les décors, mix entre châteaux, créneaux et cabarets, renforcent cette atmosphère chevaleresquo-dansant. Evidemment, quelques cascades surprendront les moins aguerris, mais que serait une comédie de PEF sans chute de trois mètres de haut ou murs dans la gueule !

Vous l’aurez compris, cette quête de Graal n’est prétexte qu’à une bonne rigolade entre potes mais il ne faut pas s’y tromper, pour que la magie opère la mise en scène doit être tirée au cordeau, et en cela PEF excelle.

Alors, que vous alliez au théâtre une fois par an  ou dix fois par mois, n’hésitez plus et courez applaudir ce Spamalot sauce frenchie. Et à ce qui n’aimeront pas, je conseille Robin des Bois et une cure de Biactol !

 

* Pierre-François Martin-Laval

 

SPAMALOT

Jusqu’au 17 avril 2014
Genre : Comédie Musicale
Bobino / 14 - 20 rue de la Gaité 75014 PARIS
Produit par Daniel Tordjman et Arthur Benzaquen
Adaptation et Mise en scène de Pierre-François Martin Laval
Direction Musicale : Raphaël Sanchez
Chorégraphie : Stéphane Jarny
Décors : Franck Schwartz
Costumes : Jean-Michel Angays
Distribution:
Arthur : Pierre-François Martin-Laval
La Dame du Lac : Gaëlle Pinheiro ou Claire Perot
Galahad : Arnaud Ducret ou Florent Peyre
Robin : Christophe Canard
Bédévère : Pierre Samuel
Lancelot : Philippe Vieux
Patsy : Andy Cocq
L'historien : Laurent Paolini

 




Marche ou crève (heu ! S’il vous plaît)

Bonjour M’sieur Dame, excusez moi de vous importuner une nouvelle fois, mais vu que vous préférerez me lire plutôt que d’aller sauver le monde… hein ! Canaillou(se) !

J’va vous conter un peu ma vie, en effet je viens de finir une course à pied. Et là vous vous dites oh non !  Il ne va tout de même pas oser nous vanter l’immense satisfaction d’engloutir 40 bornes en mini short moule-gonades, éclairé par ampoules aux pieds avec option néon 40 000 watts et des cuisses en feu mais épilées (rapport à mon dernier article, merci pour ceux qui suivent).

Que nenni ami lecteur ! Cela n’aurait rien à voir avec votre blog préféré. Je viens tout humblement d’achever la course la plus mortelle au monde, assis dans mon fauteuil Louis XV (prononcez Poäng en suédois). Il s’agit bien sûr de Marche ou Crève de Richard Bachman (alias Stephen King ou l’inverse).

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Achever est le bon terme car dans ce roman à l’eau de sueur écrit en 1979, tout participant marchant en-dessous de 6,5 km/h est exécuté après 3 avertissements (tout de même, grand seigneur !). Le but du jeu car il s’agit d’un genre de télé-réalité avant l’heure mais sans les SMS, est donc de terminer dernier (survivant), il ne doit en rester qu’un, comme dirait tonton MacLeod. Le vainqueur reçoit une très grosse somme d’argent ainsi que la réalisation d’un «vœu».

Au premier abord, ainsi qu’au deuxième, ce genre road book peut sembler long, les pages s’égrainent semant les corps des jeunes concurrents, terreau d’un fertile vainqueur (oh c’est beau). Pour nous aider à nous repérer, le récit se focalise sur Ray(mon) Garraty. Au travers de ses rencontres, ses doutes, ses rêves, nous sommes plongés au cœur de la course, devant une foule en liesse massée en liasse sans se lasser (oups, mon lacet s’est défait !). Au-delà de la douleur, lorsque le mental vous a abandonné depuis longtemps, la victoire n’est plus l’objectif, seul l’espoir d’une délivrance vous tient encore debout. Malgré tout, des amitiés sont possibles, voire même une certaine entraide contre nature entre les candidats.

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Extrait 1 : « Ralentissons un peu, dit Mc Vries. On va y aller mollo. Rejoindre Baker. Nous entrerons dans Augusta ensemble. Les Trois Mousquetaires. Qu’est-ce que t’en dis, Garraty ?»

Extrait 2 : « – Nous voulons tous mourir, déclara-t-il. C’est pour ça que nous faisons ça. Sinon pourquoi, Garraty ? Pourquoi ? »

Extrait 3 : « – Je vais marcher à te crever. »

Le rythme de la fin s’accélère comme si l’auteur était pressé d’en finir, on entend presque Maman King crier à son Stephen de fils : « dépêche-toi, ta soupe va refroidir ! » C’est un petit peu dommage car l’ensemble du roman est parfaitement équilibré.

Pour conclure, je me pose la question : Ne sommes-nous pas déjà engagés dans cette course ? Vous avez 3 heures je relève les copies à la fin!

Je vous laisse là-dessus, vous pouvez retourner sauver le monde, j’ai ouï dire que c’était un job à temps plein.

Informations :
Marche ou crève – Stephen King (Richard Bachman)
Le livre de Poche – Fantastique
Code ISBN : 978-2-253-15139-5
Prix public : 6,60 €




Entretien (au poil) avec un vampire de la littérature

Robert Langdon embarqué malgré lui dans une course contre la montre afin de déchiffrer un code, poursuivi par une organisation secrète à travers une ville musée, accompagné d’une ravissante jeune femme.

Du déjà lu ?

 

INFERNO Dan Brown
INFERNO Dan Brown

Improbable entretien :

Assis là en lisant les dernières pages d’INFERNO, le dernier roman de Dan Brown, dans mon institut de beauté préféré j’attends pour mon épilation du… (enfin bon peu importe). Un homme me regarde fixement  (oui, je suis d’accord, il y a beaucoup trop d’hommes dans cet institut) et m’adresse la parole :

–        Hey I’m Dan Brown and I’ve written this book.

(Hey je suis Dan Brown et j’ai écrit ce livre)

La suite du récit sera intégralement en français !

–        Bonjour, lui répondis-je, je suis Olivier et je viens me faire épiler le… enfin bon peu importe.

–        Puis-je vous demander ce que vous avez pensé de mon dernier roman ? Soyez sincère !

–        Dan, on peut se tutoyer ?

–        Oui, bien sûr…

(Tout comme je me l’étais promis après mon avant-dernière cuite : « pluuuuus jamais !» mais voilà j’ai replongé dans ses pages)

–        Dan ! Dan ! Mon Dany ! Tu ne pouvais pas le laisser un peu tranquille le Robert ! Ce n’était pas assez de l’avoir fait courir dans tout Rome, lui faire visiter Paris et Washington au pas de course, le fâcher avec l’église et les Francs-maçons. Il a fallu que tu entraînes le plus célèbre symbologiste du monde, accablé d’une amnésie partielle que l’on espère passagère, à Florence, Venise, et Istanbul, en avion, qui plus est, pourtant tu sais qu’il n’aime pas l’avion le Robert !  Tu lui assènes tes coups de théâtre, mais tel un vieux ballon dégonflé cela ne rebondit plus comme avant. Oui, cela fait de magnifiques cartes postales  et tu restes un incroyable guide culturel, tu aurais même pu sous-titrer ton roman  « Les musées de la Renaissance pour les Nuls ».

Cette fois, t’as pas lésiné : fin du monde, virus, manipulations génétiques, gros bateau et méchants très très méchants (Ron Howard va exploser son budget prod.) ! Certes c’est dans les vieux pots… mais du pot, le Robert, il n’en a pas. Il a la loose attitude tout de même, il ramasse grave, reconnais-le ! Bon ok, une fois de plus, tu le flanques de la belle intello du coin qui tombera forcément amoureuse du beau Robert en costume Armani (exit la veste en tweed), à l’instar de Sophie (Da Vinci Code) elle martèle, mais se marre-t-elle ? Est-elle mortelle ou mord-elle ? Je la cite :

«Tueriez-vous la moitié de population pour empêcher l’extinction de l’espèce humaine ? »

Voilà, ça y est, tu fais la moue, ne le prends pas mal,  j’ai même apprécié la présentation : La divine Comédie de Dante Alighieri cité au moins 120 fois, quel enfer (pardonne-moi) ! Sur fond de surpopulation mondiale ; ça c’est une idée ! Alors que tout le monde s’acharne à sauver les bébés dauphins ou les grenouilles sauvages de Nouvelle Guinée toi, tu nous expliques gentiment que l’on est trop nombreux sur Terre et qu’il faudrait voir à en éliminer certains, la moitié en fait, au bas mot, et si possible les plus mauvais.

Ton style est fluide à l’excès, telle une grenadine trop sucrée : c’est agréable mais on a envie de vite boire autre chose derrière.

Voilà, je t’ai tout dit, et pourtant je dois l’avouer, à peine refermé j’ai déjà hâte d’ouvrir ton prochain livre, mais pitié, la prochaine fois, laisse les gondoles à Venise et Robert… à la maison.

–        Hey ! mais justement le prochain sera une aventure totalement différente : un professeur en  symbologie se réveille dans une chambre d’hôtel…

–        Dan ! Dan !

–        But what ?

–        Non, rien mais la cire est chaude.

 

Extrait 2 :
« Langdon se sentait nauséeux. La seule personne en qui il avait eu confiance, dans cet imbroglio, était Sienna. Et tout était faux ? Non, il ne pouvait croire que la jeune femme voulait, comme Zobrist, répandre une maladie mortelle sur la planète. »

 

Informations :
INFERNO – Dan BROWN
Editions : JC Lattès
Collection : Thrillers
Date de Parution : 05/2013
Code EAN/ISBN : 9782709643740
Prix public : 22,90€

 




Mélodie pour une insomnie – la Norvège l’autre pays du Polar

Melodie pour une insomnie

Jusqu’où irions-nous pour retrouver le sommeil ? Pour son deuxième livre, le norvégien Jorgan Brekke répond à cette question d’une manière personnelle et pour le moins …. Tranchante.

Déjà au titre, nous savons que la nuit qui va suivre la lecture de ce livre sera agitée.  L’insomnie chronique, la fatigue, l’épuisement que rien ne peut soulager, si ce n’est une berceuse composée en 1767 qui, en l’écoutant, redonnerait un sommeil « éternel ». Peu banal !

On est bien loin de « La belle au bois dormant », et si pour Charles Perrault ou les frères Grimm un baiser suffit à réveiller la princesse, pour Brekke le scalpel est un outil bien plus efficace pour endormir. En effet, afin de pouvoir retomber dans le bras de Morphée au bruit du marchand de sable, le tueur déroule sa partition employant toutes les ficelles du parfait tueur en série : tromperies, séquestrations, tortures morales et physiques (tiens je bave !) le tout avec l’allure de « monsieur tout le monde ».

Jorgen Brekke est un mélomane du crime, usant de toutes les ruses du polar sans tomber dans l’excès : un flic abîmé par le temps se remettant difficilement d’une grave maladie, passionné par son boulot et des victimes innocentes seulement coupables de posséder le don du chant. Une intrigue d’une extrême habilité, rendu encore plus percutante par une seconde enquête sur le meurtre d’un troubadour menée en 1767, genèse des crimes. Le style est fluide et adroit. On a plaisir à enchainer les paragraphes alternant passé et présent, Jorgen Brekke s’amuse à jongler entre les époques et nous avec.  La conclusion du livre ne laisse aucun doute sur une future suite…attendue.

Si ce thriller était une couleur ce serait le rouge, s’il était une symphonie, Jorgen Brekke en serait le chef d’orchestre, et le tueur : son premier violon.

Extrait :
« – Elle est sur la table d’autopsie depuis moins de trois heures. Nous sommes des scientifiques, pas des magiciens. Si tu veux des réponses plus simples que celles que nous pouvons t’apporter, je te suggère de te mettre à lire des romans policiers […] »

 

Informations :
Mélodie pour une insomnie – Jorgen Brekke
Traduit du norvégien par Carine Bruy
394 pages
Editeur : Balland (avril 2013)
ISBN : 978-2-35315-169-1

 




Clint Eastwood Un rebelle américain – Marc ELIOT

Les biographies sont toujours des ouvrages difficiles à concevoir, celle-ci ne fait pas exception pour trois raisons : le sujet est toujours de ce monde, n’a pas été associé à l’écriture et surtout il s’agit de MONSIEUR Clint…

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L’avantage indéniable que Clinton Elias Eastwood Jr n’ait pas collaboré à ce livre est une approche plus rationnelle du sujet, il n’y a pas d’influences internes. Ceci permet à Marc Eliot de présenter la légende mais aussi et surtout l’homme avec ses forces et ses failles.

Outre la carrière (68 films tous confondus), cet ouvrage nous plonge de l’autre côté de l’écran, dans le monde du cinéma hollywoodien, pas très loin des paillettes, mais plus proche de celui de l’argent. Car oui, il faut de l’argent pour faire un film et oui il doit rapporter des Million Dollar Baby ! Sur ce point, Dirty Harry, maîtrise son sujet.

Moteur, Action et çaaaaaa tourne ! Voici comment M. Eastwood mène sa vie, tant mieux pour ceux qui peuvent suivre son rythme et ses changements de directions, tant pis, et ils sont plus nombreux, ceux que Clint a laissé sur la route (de Madison) ou Au-delà (ouh j’ai honte !). Souvent Jugé coupable d’un manque artistique de la part des critiques, à la limite de L’Epreuve de force, il s’acharna à garder les pleins pouvoirs sur sa carrière tel Le maître de guerre Impitoyable.

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Autant adulé que détracté, certains diront qu’il a su donné sa chance à La relève  (ex : Mickael Cimino pour le Canardeur) ; les autres, le doigt sur la gâchette, le viseur Dans la ligne de mire, affirment que ce n’était par soucis de garder le haut de l’affiche qu’il s’est souvent entouré de débutants.

Son style de vie tient également une grande place dans cet ouvrage  sans jugement et sans fausse pudeur, Marc Eliot retrace les nombreuses conquêtes, leurs conséquences, ses descendances assumées ou non, mais également son engagement politique.

Extrait :

« On ne pourrait en aucun cas qualifier Clint de libéral. Mais il n’a jamais été non plus dans le prosélytisme républicain absolu. « Indépendance pragmatique », telle est la meilleure façon de décrire ses idées politiques ».

A noter, la très honnête et belle préface d’Eric LIBIOT, fan de la première heure.

Extrait :

« A la question : « Pourquoi racontez-vous cette histoire-là ?, Clint Eastwood balance la même réponse depuis toujours : « comme l’alpiniste à qui on demande pourquoi il va escalader cette montagne, je réponds : « Parce qu’elle est là » » .

Bref, un livre à conseiller aux aficionados pour en apprendre plus sur l’homme, mais aussi à ceux qui le sont moins pour comprendre la légende.

MONSIEUR Clint restera pour toujours dans les Mémoires de nos pères. Et même si nous ne vivons pas dans Un monde parfait, ce Doux, dur et dingue à bord de sa Gran Torino nous le rend plus distrayant. Rawhide ! 

 

Clint Eastwood Un rebelle américain, Marc ELIOT

Ed. Balland

479 pages, 24,90 €

ISBN : 978-2-35315-187-5




«Desperate Housemen» (Pas si desperate que ça)

Trois amis aux personnalités différentes, unis autour d’un même thème : la relation Homme/Femme, peu de liens avec la série éponyme et c’est tant mieux.

Le show débute avec Jérôme (DARAN), personnage volage mais désespéré depuis sa séparation avec Sophie, passage de relais avec Stéphane (MURAT), idiot romantique et gaffeur à ses heures, et enfin Alexis (MACQUART), doucement misogyne subissant sa vie de couple depuis 10 ans.

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Attention danger : Grande probabilité de recevoir des éclats de rire de vos voisins de banquette. Vénusiennes, vous vous demandiez comment était perçue votre « relation » par ces êtres venus de Mars, avec ce spectacle vous en aurez une bonne approche. Tous les thèmes sont abordés : les rencontres, l’amour, le sexe, les séparations (mention spéciale à Stéphane et sa technique dite de « la couette » testée et approuvée).

Même si les femmes y sont plus légèrement égratignées (les éternelles discussions entre copines, l’interminable résumé de la journée de boulot, le shopping…) les hommes ne sont pas en reste (les soirées entre potes, les maladresses, l’incapacité au dialogue…).

Le public rebondit aisément sur ces ressorts comiques connus mais toujours efficaces et parfaitement maîtrisés. La pièce s’achève avec nos 3 amis devant la porte de Sophie, je n’en dirai pas plus. Bon, je ne vous laisserai toutefois pas sans un bémol commun à tout spectacle réussi, il est bien trop court !

Un conseil : allez-y en couple !

Merci Messieurs pour ce bon moment.

Pratique :
Le Grand Point Virgule
8 bis, rue de l’Arrivée 75015 Paris
Réservations : 01 42 78 67 03 – WWW.LEGRANDPOINTVIRGULE.COM

Les samedis à 18h00 et les lundis 20h

Tarif plein: 27 €
Tarif réduit: 19 € (sauf le samedi)

Durée : 1h20

Avec Jérome Daran, Alexis Macquart et Stéphane Murat
Mise en scène : Caroline Cichoz




1275 âmes (et quelques morts plus tard) de Jim Thompson

Crédit photo : Folio Policier
Crédit photo : Folio Policier

Polar sauce western,  1275 âmes est le récit du shérif de Pottsville, Nick Corey, héros délicieusement antipathique d’une ville qui ne l’est pas moins.

Sous des airs tout d’abord lâches et fainéants, nous le découvrons au fil des pages rusé et manipulateur se jouant de l’hypocrisie et de la vilénie des 1275 habitants.  Justifiant le meurtre (et sa lâcheté) par une mission divine. Qui sont les innocents, qui sont vraiment les coupables ? Certainement tous et personne à la fois.

Qualifié de Polar rural, proche de l’atmosphère de John Steinbeck et des décors de Mark Twain, mais la comparaison s’arrête bien ici. Publié en France en 1966, ce roman conjugue le cynisme à tous les temps.  Les femmes sont calculatrices et les hommes des pochetrons paresseux. Amateur de bons et beaux sentiments fuyez !  Pour tous les autres, vous adorerez détester les personnages. Les dialogues peuvent parfois dérouter mais nous resituent dans une Amérique profonde  où les « nom de nom » ou « Et v’la-ti’ pas… » sont légions. Il y a peu d’indication temporelle dans cet ouvrage, nous déduisons simplement que  l’esclavagisme n’est pas encore aboli, peu importe, l’action pourrait se transposer à notre époque ce qui rend ce polar encore plus captivant.

 

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Extraits :

« – C’est mon métier, oublie pas, de punir les gens pour le simple fait qu’ils sont des êtres humains. De les amadouer jusqu’à ce qu’ils se montrent tels qu’i’ sont et ensuite de leur tomber dessus. Et c’est un sale boulot, figure toi, mon loup, et j’estime que le plaisir que je peux trouver à les piéger,  j’ai bougrement mérité. »

« Je suis les deux à la fois, […] Le type qu’est trahi et celui qui trahit l’autre, les deux en un seul ! »

1275 âmes

Traduit de l’anglais (États-Unis) : Marcel Duhamel

Titre original : Pop. 1280

Édition originale : Gallimard / Série Noire – Janvier 1966
Rééditions : Gallimard / Série Noire – Septembre 2005 /
Dernière édition poche : Folio Policier – Octobre 1998
Autres éditions : Folio – Juin 1988 / Carré Noir – 1980 /

Adaptation au cinéma : Coup de Torchon de Bertrand Tavernier.




La Théorie de l’Information – Aurélien Bellanger

A travers Pascal Ertanger, avatar de Xavier Niel, Aurélien Bellanger romance les premiers pas de la télématique et nous replonge dans les débuts de l’Internet. Amour, trahisons, épopées technologiques, tous les ingrédients d’un roman d’exception sont là, et pourtant …

Seulement 30 ans séparent la naissance du minitel de celle du web 2.0, si peu d’années pour une si grande révolution, voici en synthèse le fond du livre. Quant à la forme, elle prend corps par le personnage central que nous découvrons enfant, chétif, presque mal dans sa peau. Pascal grandit, mûrit, trop et trop vite pour finir en ermite moderne, mégalomane mystique, tel un Foster Kane (1) isolé dans son palais à préparer la prochaine révolution.

Des premiers tests sur le minitel et son essor notamment grâce au minitel rose, de la prise de conscience que sans support de diffusion l’information n’existe pas, à l’apogée du web participatif, tout y est aussi bien sous forme romancée que technique façon Wikipédia, mais à trop vouloir contenter tout le monde on finit par ne plaire à personne, et c’est, peut-être là la faiblesse de ce premier opus.

Chaque chapitre débute par des interludes, références à la première révolution industrielle eux-mêmes divisés en trois époques  (steampunk, cyberpunk et biopunk), habilement mis en parallèle avec le roman mais sous une forme bien trop technique pour s’y passionner jusqu’au bout. On sent un style proche de M. Houellebecq mais sans toutefois l’atteindre et l’on regrette cette audace qui, si elle avait été plus modérée, n’aurait nullement nui à l’ensemble.

Extraits :

« Je veux à présent faire de la rétro-ingénierie divine. Car toute machine à calculer, depuis celle de Pascal, est une tentative qui vise à énumérer le nom infini de Dieu, son nom mathématique »

« Derrière mon activité officielle de fournisseurs d’accès à Internet, je fournissais en réalité le réseau en vies humaines. »

« Pascal croyait à la théorie de l’information comme à une théorie religieuse. »

« On fit de Pascal Ertanger un savant fou, un apprenti sorcier et un eugénsite. On le compara au milliardaire fou Howard Hugues […] ».

Que devons-nous retenir de La Théorie de L’information ? Beaucoup de choses en fait, outre le bain chaud de la nostalgie (on se souvient du son mélodieux de la connexion minitel ou de celui des modems 56K), ce roman pose un certain nombre de questions sur notre avenir, sur ce que l’on veut y laisser : si ce n’est de l’information, que restera-t-il de nous ? De plus, c’est un livre que l’on peut lire dès maintenant bien sûr, ou dans 10 ans et s’amuser du chemin technologique parcouru lorsque nous découvrirons nos E-mails 4D sur des I-Phone 12, mais aussi à la veille de l’extinction de l’humanité pour s’entendre dire « Et pourtant on nous avait prévenus »…

 

Note :
(1)   Personnage principal du film CITIZEN KANE 1941 (Orson Welles)

 

 

LA THEORIE DE L’INFORMATION :

Aurélien BELLANGER
Édition Gallimard
Collection Blanche Roman
496 pages 22,50 €
ISBN : 9782070138098




Beigbeder – Sur une banquette du Flore…

Frédéric Beigbeder
Frédéric Beigbeder

Auteur réussissant à apprivoiser la mélancolie en la métamorphosant en une douce promenade sur la plage. C’est bon comme un mars d’1 m50 (celui qui repart), un buffet à volonté sans pique assiette, une douzaine d’huitres déjà ouvertes et en plus c’est 0 calorie dedans.

Qu’entend-on le plus souvent sur M. Beigbeder ? Un noceur, un dandy, sexuellement obsédé. Que retrouve-t-on le plus souvent dans ses livres ? Des noceurs, des dandys, des nymphomanes dénudées. Voilà nous pourrions nous arrêter là et passer à côté de Frédéric, car son œuvre est, bien entendu, tout autre.

Frédéric Beigbeder, mode d’emploi :

Etape 1 : Commencer par la fin, oui, par son dernier livre Un roman Français non pas parce qu’il est le meilleur (prix Renaudot, tout de même) mais parce qu’il est le plus personnel et sûrement le plus honnête, on découvre l’homme derrière l’écrivain, d’ailleurs chacun de ses livres a quelque chose d’autobiographie ou une « autofiction prospective » comme  le décrit Houellebecq.

Citation 1 : « C’est l’histoire d’un garçon mélancolique parce qu’il a grandi dans un pays suicidé, élevé par des parents déprimés par l’échec de leur mariage. »

Etape 2 : Reprendre par le début, la trilogie Marc Marronnier : Mémoires d’un jeune homme dérangé, Vacances dans le coma et L’amour dure trois ans. Une lutte sans fin pour trouver l’amour, le consumer et surtout le perdre, afin de recommencer, dans cet ordre, invariablement. L’empreinte Beigbeder y est déjà forte avec des formules dignes d’Audiard (le père).

Citation 2 : « Vive la drague droguée ! Plus besoin de briller, de dépenser des fortunes, de diner aux chandelles : une gélule et puis au lit ! ».

Citation 3 : « Il me faudra une corde avec un nœud comme ce fromage : bien coulant. »

Citation 4 : « A New York les taxis sont jaunes, à Londres ils sont noirs et à Paris ils sont cons. »

Etape 3 : Enfiler le costume du plus célèbre publicitaire névrosé : Octave Parango, dans 99 F (rebaptisé 14,99), en oubliant, s’il vous plaît, le film, pour finir dans une Russie en déconstruction dans Au secours Pardon où, après quelques années de prison, Octave confie son errance amoureuse à un prêtre orthodoxe à la Camus dans La Chute et détruit tout puisque plus rien ne peut survivre.

Citation 5 : « Les bombes, je les préfère sexuelles, et les attentats, à la pudeur. »

Etape 4 : Ne passer surtout pas à côté de L’Egoïste Romantique, Octave (encore un !, en musique une octave est l’intervalle séparant deux sons dont la fréquence fondamentale de l’un vaut le double de la fréquence de l’autre, tiens tiens !), cet écrivain « égoïste, lâche,  cynique et obsédé sexuel – bref un homme comme les autres » nous partage son journal intime, les jours s’écrèment alternance d’épanchements romantique et de regards lubriques, on se délecte de ses frasques et des ses rencontres.

Citation 6 : « Ce qui serait bien, à présent, pour l’évolution de l’histoire du cinéma, ce serait de tourner un film porno où les acteurs feraient l’amour en se disant « je t’aime » au lieu de « Tu la sens, hein, chiennasse ». Il paraît que cela arrive, dans la vie (L’idéal est d’alterner les deux) ».

Citation 7 : « Les hommes sont toujours entre une ex et une future, car le présent ne les intéresse pas. Ils préfèrent naviguer entre la nostalgie et l’espoir, entre la perte et le fantasme, entre la mémoire et l’attente. Nous sommes toujours coincés entre deux absentes. »

Etape 5 : Voilà votre Frédéric Beigbeder est quasiment monté, tel un meuble Ikea, mais sans douleur. Reste les finitions, avec Windows on The World coincé dans la tour Nord du World Trade Center le matin du 11 septembre, vous n’avez plus que quelques heures à partager avec de parfaits inconnus, à quoi les passons-nous, à qui ou à quoi pense-t-on ?,  bilans de vies qui s’achèvent, entrecoupé d’un petit déjeuner au Ciel de Paris en habile parallèle.

Etape 6 : Toujours pas rassasié ? Plonger sans retenu dans Nouvelles sous ecstasy, inventaire hallucinant d’images et d’actes tous plus incontrôlés les uns que les autres sous influences d’ecsta et retours de shoots. On se demande où est la part de réel ce qui libère le propos, le rend plus honnête. A lire et relire sans limite le chapitre : Comment devenir quelqu’un, tout simplement splendide.

Citation 8 : « S’abîmer de manière irréversible le cœur, gâcher sa vie pour quelqu’un, et pleurer, vivement pleurer ! Plus besoin de cachets, ni de fouets, tu seras à la merci de ses yeux et de ses lèvres. En pensant à ses baisers et son parfum, tu auras de nouveau la respiration difficile ».

Citation 9 : « On naît, on meurt, et s’il se passe quelque chose entre les deux, c’est mieux (F. Bacon) ».

Citation 10 : « Il existe une zone de flou artistique entre le célibat dépressif et le mariage ennuyeux : baptisons-la bonheur ».

Encore un peu de souffle ?  Dernier inventaire avant liquidation où ce qu’il faudra avoir lu du XXe siècle.

Je laisserai le mot de la fin à Michel Houellebecq : « Frédéric Beigbeder [est] peu à peu devenu une sorte de Sartre des années 2010, ceci à la surprise générale et un peu à la sienne propre, son passé le prédisposant plutôt à tenir le rôle d’un Jean-Edern Hallier, voire d’un Gonzague Saint-Brice. »

 Bibliographie non exhaustive

  • 1990 : Mémoire d’un jeune homme dérangé, La Table ronde.(Roman)
  • 1994 : Vacances dans le coma, Grasset. (Roman)
  • 1997 : L’amour dure trois ans, Grasset. (Roman)
  • 1999 : Nouvel sous ecstasy (nouvelle)
  • 2000 : 99 francs (14,99 euros), Grasset. (Roman)
  • 2001 : Dernier inventaire avant liquidation (Essai)
  • 2003 : Windows on the World, Grasset, prix Interallié. (Roman)
  • 2005 : L’Égoïste romantique, Grasset. (Roman)
  • 2007 : Au secours pardon, Grasset. (Roman)
  • 2009 : Un roman français, Grasset, prix Renaudot. (Roman)