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[Agenda] Exposition : Ciao Italia. Un siècle d’immigration et de cultures italiennes en France (1860-1960)

« Ciao Italia. Un siècle d’immigration et de cultures italiennes en France (1860-1960) »

Exposition au Musée de l’histoire de l’immigration

À partir du 28 mars 2017

Famille napolitaine Boulevard Saint Germain Paris 1880 © Galerie Lumières des Roses
Famille napolitaine Boulevard Saint Germain Paris 1880 © Galerie Lumières des Roses

Dominique Païni, Commissaire d’expositions indépendant
Stéphane Mourlane, Maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université d’Aix-Marseille
Isabelle Renard, Responsable de la collection d’art contemporain au Musée national de l’histoire de l’immigration
Avec Ciao Italia, exposition présentée à partir du 28 mars 2017, le Musée national de l’histoire de l’immigration rend compte pour la première fois à l’échelle nationale, de l’histoire de l’immigration italienne en France, qui reste à ce jour la plus importante de l’histoire française.
Dès la seconde moitié du 19e siècle et jusque dans les années 1960, les Italiens furent les étrangers les plus nombreux dans l’Hexagone à venir occuper les emplois créés par la croissance économique.
Aujourd’hui célébrée, leur intégration ne se fit pourtant pas sans heurts. Entre préjugés dévalorisants et regards bienveillants, l’image de l’Italien en France se dessina sur un mode paradoxal et leurs conditions d’accueil furent difficiles.
Entre méfiance et désir, violences et passions, rejet et intégration l’exposition traduit les contradictions spécifiques de l’histoire de cette immigration tout en mettant en lumière l’apport des Italiens à la société et à la culture françaises.

Fête de bienfaisance organisée par la Société italienne de Bienfaisance de Paris le 3 mai 1924. Leonetto Cappiello © Pierre Cappiello
Fête de bienfaisance organisée par la Société italienne de Bienfaisance de Paris le 3 mai 1924. Leonetto Cappiello © Pierre Cappiello

Jouant des clichés et préjugés de l’époque et rappelant la xénophobie dont ils étaient victimes, l’exposition s’attache à retracer le parcours géographique, socio-économique et culturel des immigrés italiens en France du Risorgimento des années 1860 à la Dolce Vita célébrée par Fellini en 1960.

Abordant tout à la fois la religion, la presse, l’éducation, les arts, la musique et le cinéma, les jeux et le sport, ou encore la gastronomie, elle donne à voir tous ces Italiens, ouvriers, mineurs, maçons, agriculteurs, artisans commerçants ou encore entrepreneurs qui ont fait la France tout en rendant hommage aux plus connus d’entre-eux à l’instar d’Yves Montant, de Serge Reggiani, de Lino Ventura ou encore des familles Bugatti et Ponticelli.
Dans un dialogue original et fécond ce sont près de 400 objets de mémoire, extraits de films, cartes géographiques et œuvres d’art qui sont présentés au travers d’un parcours à la fois sensible et pédagogique où figurent les artistes Giovanni Boldini, Giuseppe de Nittis, Gino Severini, Renato Paresce, Filippo De Pisis, Massimo Campigli, Mario Tozzi, Alberto Magnelli, Leonardo Cremonini, Amedeo Modigliani et Alberto Martini.
PALAIS DE LAPORTE DORÉE
MUSÉE NATIONAL DE L’HISTOIRE DE L’IMMIGRATION PALAIS DE LA PORTE DORÉE.  293, avenue Daumesnil – 75012 Paris
(Source : Dossier de Presse)



[Critique-Théâtre] Un radiateur vous manque, et tout est dépeuplé

Photo : Elisabeth Carecchio
Photo : Elisabeth Carecchio

Daria Deflorian et Antonio Tagliarini, après avoir rejoué « Nous partons pour ne plus vous donner de soucis » aux Ateliers Berthier la semaine passée, spectacle créé l’année dernière qui avait été salué par la critique, reviennent jusqu’au 18 décembre avec leur nouvelle création « Le ciel n’est plus une toile de fond » qui explore la précarité et notre rapport à autrui.

Fascinés par le fait de comprendre où se trouve la frontière entre notre monte intérieur et notre monde extérieur et la façon dont nous existons et apparaissons au monde, Daria Deflorian et Antonio Tagliarini dans leur dernière création s’étaient intéressés au sort de quatre retraitées grecques qui se sont données la mort en raison de la crise économique. Nourrie de cette expérience de jeu sans recherche de vraisemblance pour jouer les retraitées, la nouvelle création « Il cielo non è un fondale » engage une réflexion aboutie sur le fond et la figure, sur le rêve et la réalité en complicité avec le spectateur. Tout commence d’ailleurs par le rêve de l’un des comédiens, qui y aurait vu Daria allongée au sol dans la rue, et aurait passé son chemin sans lui venir en aide. Une précarité qui a tout à voir, quand on pense à l’origine italienne des metteurs en scène, avec ces réfugiés qui échouent sur les plages de l’Italie, une image qui fait d’autant plus sens qu’à plusieurs reprises, les comédiens chutent au sol ; décontextualisé, le naufrage de l’humanité à peine esquissé pèse sur la pièce.

De là, des situations s’enchainent et s’entremêlent pour élucider notre rapport à la précarité et le sentiment de culpabilité, et ou de responsabilité que notre regard sur une personne dans le besoin, à terre dans la rue entraine et déclenche en nous. Dans un monde qui tend à s’urbaniser et où la ville nous efface, comment habiter l’espace urbain et densément peuplé ? Les comédiens et metteurs en scène s’emparent de la notion de paysage pour lui donner la parole sur un plateau dénué de tout décor où pourtant, règnent les bruits de la ville en fond sonore presque continu. Influencés par les écrits d’Annie Ernaux, « La Place » ou encore « Journal du dehors » dans lesquels l’auteure a consigné des conversations qu’elle a entendues dans les grandes surfaces ou les transports en commun, Daria Deflorian et Antonio Tagliarini ont voulu, à la manière d’Annie Ernaux, recréer et explorer les conditions d’une observation du monde à travers leurs expériences personnelles et le récit qu’ils livrent d’eux-mêmes. Un récit qui par extension, interroge le propre récit que nous livrons sur notre existence et le fait que finalement, nous vivons tous ensemble dans des mondes différents façonnés par nos expériences. Quand Daria Deflorian nous parle de ses soirées au supermarché, à en faire la fermeture à la recherche d’achats à faire qui la rendraient normale et conforme au monde, elle nous dit beaucoup sur le monde actuel et la détresse de ceux qui l’occupe.

D’un constat acerbe porté sur le monde traversé par des détails de la vie de chacun, nait un spectacle teinté de beaucoup d’humour et de lucidité où le radiateur qui occupe le plateau le temps de la représentation tend à se démultiplier, pour contribuer à réchauffer un monde devenu trop aride.

« Il cielo non è un fondale » [Le ciel n’est pas une toile de fond], de Daria Deflorian et Antonio Tagliarini, jusqu’au 18 décembre, aux Ateliers Berthier, Théâtre de l’Odéon (17e), 1, rue André Suares, 75017 Paris. Durée : 1h30. Plus d’informations ici : http://www.theatre-odeon.eu/fr/2016-2017/spectacles/il-cielo-non-e-un-fondale

 




Mercredi – The Sopranos : Mon papa à moi est un gangster

Attention on ne confond pas Les Sopranos et Soprano le rappeur marseillais, les Sopranos c’est la famille italo-américaine au cœur de la série éponyme.

Ne comptez pas sur eux pour chanter, pas même la Traviata.Mais peut être vous feront-ils chanter parce qu’ils sont dans le milieu…

Le tableau est planté dans les années 90 dans le New Jersey et pourtant ça n’a pas pris une ride. Le « mafia blues » mais avec une densité et un suspens en intraveineuse… de l’humour et aussi de la violence.

Plus qu’une série, c’est un mythe aux effets collatéraux avérés…
OUI mesdames, vous aurez envie de passer en cuisine préparer des plateaux entiers de charcuterie italienne,
OUI messieurs, vous serez sans doute pris de la soudaine envie de vous gominer les cheveux,
OUI messieurs-dames, vous allez subitement parler avec les mains.


The Sopranos c’est David Chase aux manettes de 6 saisons avec un générique plus long que le plus grand spaghetti du monde pour la chaîne de télé US HBO.
La mafia, son réseau, ses magouilles, ses « capos » et au centre le padre, Antony Soprano (James Gandolfini ), Tony pour les intimes. En façade, il est bon père de famille assez dodu, un peu dégarni un charisme bien trempé. L’autorité incarnée, le mari, le père, le fils toujours avec fermeté et un machisme sans failles. Au milieu de sa quarantaine il est pris d’états d’âmes comme s’il avait choppé une grosse grippe et entame dans le plus grand secret une psychanalyse pour en venir à bout. Ça n’est pourtant pas l’argent qui manque dans la famille – les Sopranos habitent dans une villa coliséenne -, ni les valeurs reçues en héritage – les Sopranos ont une large famille et des rituels gastronomiques bien établis. En bon italien le sujet de la « mamma » sera longuement abordé avec le Docteur Melfi (Lorraine Bracco). Tony est un malabar, par la carrure, mais un malabar bi-goût, moitié tendre pour la famille moitié intraitable pour le business. Deux intérêts difficilement conciliables… et pourtant il est à la tête d’une organisation de malfaiteurs bien huilée.


Plus qu’un coup cœur une série inoubliable, s’il existe des classiques en littérature celui-ci est un classique des séries…. à partager avec vos amis comme une large pizza.

The Sopranos – The Trailer (VO)

 


The Sopranos trailer par bunglefever

 




Michel-Ange au pays des éléphants …


Et si quelques semaines oubliées de la vie d’un des maestri de la Renaissance vous donnaient un éclairage nouveau sur son œuvre ?


Si comme tout le monde vous ne connaissez de Michel-Ange que ses œuvres : le plafond de la chapelle Sixtine, le David de Florence ou la Pietà de Saint-Pierre de Rome, il est temps de faire connaissance avec l’homme.


« Parle-leur des batailles des rois et des éléphants » est le récit de son escapade dans la capitale cosmopolite du monde Ottoman : Constantinople.
Bien que les faits et personnages soient réels, ce que nous propose Mathias Enard n’est ni une autobiographie ni une fresque historique. Celui qui enseigne aujourd’hui l’arabe à l’université de Barcelone, nous offre un rêve. Un rêve étrange et pénétrant d’amour interdit et de sang mêlés où plane un envoûtant parfum d’Orient.


Le roman commence à l’arrivée de Michelangelo di Lodovico Buonarroti Simoni dans la ville où trône l’inébranlable Sainte Sophie. L’artiste italien est venu remplir une mission dans cette contrée bercée par les appels à la prière et l’ivresse charnelle des nuits roses. Une mission hautement symbolique qui fut un échec pour le grand Léonard de Vinci : la construction d’un trait d’union entre les deux rives de la ville.
Dans les rues tièdes si loin du vent salé de l’Adriatique, Michel-Ange imprègne son art de cette culture rayonnante à la confluence de plusieurs civilisations.


Ce conte nostalgique est un pont aérien vers les mystères d’une cité et les dessous d’un génie acharné.


L’auteur.

Féru d’arabe et de persan il dépeint fidèlement dans ce court récit la Constantinople esthète et européenne qui a su accueillir les Européens chassés par des rois trop catholiques.

Mathias Enard démonte le mythe qu’était Michelangelo. Il construit un homme égaré, troublé, empêtré dans son siècle et contemplateur. Il s’approprie le personnage et bâtit une intimité simple entre le maestro et le lecteur. Pour finalement conquérir nos cœurs !

Mathias Enard transmet son amour contagieux du monde arabe dans un style lyrique et pragmatique. L’orientalisme et le tantrisme prégnants nous ramènent à son précédent roman, déjà chez Actes Sud, qui avait reçu le prix du Livre Inter en 2009 : « Zone ». »Parle-le leur des batailles des rois et des éléphants » a quant à lui décroché le Prix Goncourt des Lycéens (2010).




La Porte des Enfers, Laurent Gaudé

La Porte des Enfers


La mort est sans doute le dernier refuge de la religion dans nos sociétés contemporaines.


La mainmise sur la cellule familiale s’estompe peu à peu, les positions d’une grande partie de l’Eglise sur la sexualité de la société semble anachronique.

La vie sur Terre n’est quasiment plus considérée comme un passage obligé avant d’atteindre un autre monde, on a vu ainsi se développer des sociétés entières basées sur le désir, la consommation, la jouissance quotidienne et polymorphe.


Mais la mort reste propriété de l’Eglise. Les cimetières ne sont-ils pas les derniers lieux à connotation religieuse qui subsistent dans nos sociétés, aux côtés des lieux de culte ?
Ils représentent d’ailleurs un culte à eux seuls : le culte des morts.


C’est à ce culte qu’est consacré le roman de Laurent Gaudé, La Porte des Enfers.


Au commencement est un enfant, Pippo de Nittis. Jeune Napolitain, du haut de ses 6 ans, il a toute la vie à découvrir. Et pourtant, c’est sa vie qui va brutalement le quitter, un matin de marché, dans les rues animées de Naples. Un matin de marché ordinaire. Un matin où il craint d’être en retard à l’école. Un matin. Naples.

Des règlements de compte. Des échanges de tirs. Une balle perdue. Un enfant. Pippo.


Cette vie qui s’achève prématurément laisse Matteo et Giuliana désemparés. Ensemble et pourtant si seuls. Aucune communication n’est plus possible entre eux. Le spectre de leur fils se dresse désormais comme une véritable barrière dans leur couple.

Chaque regard qu’ils échangent, chaque parole qu’ils souhaiteraient prononcer viennent se heurter à la vision de leur enfant mort. Seules deux choses pourraient les réunir à nouveau : que leur fils leur soit rendu, ou que leur vengeance soit consommée.

Décor posé. Le moment est venu de plonger dans l’aventure.


L’auteur joue avec les nerfs et les émotions de son lecteur. L’atmosphère étouffante, la chaleur, la puanteur, la saleté.
Dans la lignée de L’Etranger et de La Peste de Camus, du Soleil des Scorta et de La Mort du Roi Tsongor du même Laurent Gaudé, le lecteur est opprimé, il suffoque.
Il ne reprend son souffle qu’une fois le livre terminé, l’histoire achevée, les secrets enfouis dans un oubli volontaire.

Et pourtant, dès que l’occasion se présente de replonger dans les univers oppressants que dépeint Laurent Gaudé, je ne peux m’empêcher d’y aller à pieds joints ! Et toujours sans le moindre regret !


Laurent Gaudé, La Porte des Enfers, éditions Actes Sud
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