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[Exposition] « Des nouvelles du Père Noël » : Rep ho ho ho rtage

« Des Nouvelles du Père Noël » pour les grands et les petits !

Photo : Florence Levillain, Il se fait beau, décembre 2016, Exposition « Des nouvelles du père Noël », Bercy Village.
Photo : Florence Levillain, Il se fait beau, décembre 2016, Exposition « Des nouvelles du père Noël », Bercy Village.

Bercy Village est en pleine effervescence en cette période de préparation des fêtes. Les enfants courent, crient, sautent, les parents pressés les poursuivent et cherchent à les empêcher de disparaître dans la dense foule de passants. Quoi de mieux qu’une exposition sur le Père Noël pour les amadouer le temps de reprendre son souffle ? Sous nos yeux le père Noël est chez le coiffeur, Le père Noël vole dans l’espace…Vous êtes-vous déjà demandés ce que fait vraiment le Père Noël en attendant décembre ?

Photos : Florence Levillain, Sans une bonne logistique, pas de cadeau ; Il apprend à rester zen ; Reposé, il est temps de reprendre son rôle Il s’adonne aux joies du « lâcher prise » ; Tous sont unanimes : le Père Noël a besoin de vacances ! ; Le Père Noël se prépare à toute éventualité, 26 octobre 2016 – 2 janvier 2017, Exposition « Des nouvelles du père Noël », Bercy Village, Paris.
Photos :
Florence Levillain, Sans une bonne logistique, pas de cadeau ; Il apprend à rester zen ; Reposé, il est temps de reprendre son rôle Il s’adonne aux joies du « lâcher prise » ; Tous sont unanimes : le Père Noël a besoin de vacances ! ; Le Père Noël se prépare à toute éventualité, 26 octobre 2016 – 2 janvier 2017, Exposition « Des nouvelles du père Noël », Bercy Village, Paris.

Sur les murs des passages Saint-Emilion et Saint-Vincent, on le découvre comme on ne l’avait jamais vu auparavant : à la pêche, à la mer, dans les bois, ce grand barbu vêtu de rouge parcoure le monde à travers les photographies de Florence Levillain. Et ce n’est autre qu’une photographe de reportage qui se cache derrière cette série de photographies cocasses – Florence Levillain s’est notamment fait connaître pour ses grands reportages dans la presse (Libération, Le Monde etc.) – si elle répond à de nombreuses commandes et travaille souvent avec de grandes institutions, cette année elle collabore avec la Mairie de Paris et surtout, avec un personnage bien spécial : le Père Noël.

Grâce aux petites phrases qui sous-titrent avec humour les images qui jalonnent les allées de magasins de Bercy Village, la photographe nous raconte l’histoire d’un Père Noël à la fois humain et fantastique, qui va de sa baignoire au cinéma, en passant par un petit café avec Dark Vador. Cette exposition, qui a l’avantage d’être gratuite et de ravir les enfants ainsi que les plus grands, est une immersion surprenante dans l’intimité de celui que tout le monde s’apprête bientôt à attendre sagement avec l’idée de le capturer.

Pour les moins téméraires et ceux qui n’auront pas la patience d’attendre toute une nuit au pied du sapin, à Bercy Village, Florence Levillain l’a capturé pour nous !

« Des nouvelles du Père Noël », jusqu’au 2 janvier 2017 à Bercy Village, passages Saint-Emilion et Saint-Vincent. Plus d’informations : http://www.bercyvillage.com/bercyVillage/fr/expo-desnouvellesduperenoel




« Scènes de violences conjugales » à la Tempête : Du geste amoureux à la première claque

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Photo : Mandarine.

Après deux ans de travail d’enquête au côté d’associations, de victimes et une immersion dans la lutte associative et judiciaire mise en place contre les violences conjugales, Gérard Watkins a écrit et mis en scène « Scènes de violences conjugales », oeuvre semi-fictive actuellement au Théâtre de la Tempête. Entre écriture de plateau et sujet proche du fait divers, le metteur en scène crée un spectacle saisissant pour comprendre et lutter contre la montée du geste violent au sein du couple et par extension, d’identifier les victimes directes et indirectes de ces violences, à commencer par les femmes, puis les enfants.

Sur un plateau en forme de triangle inversé donnant lieu à un espace tri-frontal et sans décor, entre d’abord une jeune femme qui prend place derrière une batterie, l’instrument surplombe la scène et n’aura de cesse de ponctuer la pièce, suggérant dès le départ une atmosphère marquée par la violence du geste.

Quand Annie rencontre Pascal, elle est en situation de précarité, elle vit chez ses parents et enchaine les entretiens ratés, notamment à cause du RER, toujours en retard. Pascal, sur le même quai qu’Annie, est un photographe dans une situation plus aisée, même s’il enchaine les échecs. D’un autre côté, Rachida est une jeune étudiante musulmane qui vit dans une cité, elle est dans un contexte familial compliqué quand elle rencontre Liam, jeune homme venu de Châteauroux sans rien sinon le désir d’une vie stable. De là, les couples emménagent ensemble chacun de leur côté, bercés par les idéaux d’une vie commune heureuse qui leur ferait échapper à leur passé et non reproduire leurs souffrances.

Avec beaucoup d’habilité et des comédiens bouleversants de spontanéité, Watkins plonge le spectateur dans le quotidien des personnages pour lesquels on se met à craindre le pire. Grâce à la création sonore et lumineuse, on guette le basculement dans la violence, impulsé par un quotidien qui, d’une certaine manière, pourrait être le nôtre. De Rachida qui ne sait pas aider Liam à monter une étagère Ikéa à Annie qui oublie comment on fait une mayonnaise, une tension s’installe, jusqu’à frôler l’insoutenable. Les femmes, en dépit de leur incompréhension, prennent le rôle de victime, une condition dont elles ne sortiront qu’après avoir vécu le pire, ce sera la perte d’un enfant pour l’une, et l’envie de disparaître pour l’autre.

Gérard Watkins parvient alors à créer un spectacle coup de poing qui invite à repenser le secours donné aux victimes et le manque de moyens déployé pour prévenir les heurts quand on sait que beaucoup de personnes violentes ne font que reproduire ce qu’elles-mêmes ont déjà subi. Lorsqu’on sait que rien qu’en France, quelques 143000 enfants vivent dans un foyer où des violences ont déjà été signalées, et qu’une femme décède tous les trois jours sous les coups de son conjoint. Par une fiction au plus près de la réalité et d’une actualité quotidiennement ponctuée par ce genre de faits dramatiques, « Scènes de violences conjugales » est un spectacle qui peut être salué pour le silence qu’il permet de lever, sinon de rompre.

« Scènes de violences conjugales », texte et mise en scène de Gérard Watkins, du 11 novembre au 11 décembre 2016 au Théâtre de la Tempête, Cartoucherie, Route du Champ de Manœuvre, 75012 Paris. Durée : 2h. Plus d’informations et réservations sur https://www.la-tempete.fr/




Pommerat : la beauté jaillit du sordide

Copyright : Elizabeth Carecchio
Copyright : Elizabeth Carecchio

Comme l’Odéon en 2013, le Théâtre des Bouffes du Nord ouvre sa saison avec un spectacle de Joël Pommerat, désormais fidèle des lieux. Créé en 2006, « Cet enfant » est une commande de la CAF du Calvados. Il a été bâti à partir de témoignages récoltés auprès de familles.

Le dispositif auquel nous a habitué le metteur en scène est bien là et toujours efficace : scènes oppressantes, sombres, qui se succèdent comme des diapositives. Voix rendues irréelles au moyen de micros. La lumière comme unique décor.

Dans « Cet enfant », on voit des tableaux de la vie populaire actuelle : Pommerat agit comme une sorte de Jean-François Millet moderne. Dans ce théâtre, il y a un rapport permanent à la peinture à travers le geste, la posture et la psychologie des personnages qui jaillit avant même les prises de parole.

De ces témoignages ressortent des dialogues entre une mère et sa fille (ou son fils), des retrouvailles sinistres entre une fille et son père supposé violent. On voit aussi une mère combative et qui voit l’arrivée de son enfant comme une raison de vivre, un père qui se sent réduit vis-à-vis de son fils depuis qu’il ne peut plus travailler…

Ce spectacle interroge la relation parents-enfants et en fait ressortir les plus grandes absurdités à travers les situations les plus extrêmes. On voit toute la détresse familiale intime des personnages qui défilent. Le spectateur est plongé dans les démons et les traumatismes d’éducations violentes.

Les textes sont cyniques. On assiste à une dispute incestueuse entre une mère et son fils : la première fait une scène de ménage à son enfant qui la délaisse pour l’école ; cette scène d’un humour particulièrement grinçant se termine par un « va, va rejoindre ta maîtresse d’école » !

Comme à son habitude, Joël Pommerat fait ressortir toute la théâtralité du monde moderne. Et il est l’un de ceux qui le fait le mieux.

« Cet enfant » de Joël Pommerat, au Théâtre des Bouffes du Nord jusqu’au 27 septembre, 37bis boulevard de La Chapelle (10e arrondissement), le mardi à 19h30, du mercredi au samedi à 20h30. Durée : 1h10. Plus d’informations sur www.bouffesdunord.com/.




La rébellion de Kim Nguyen

 

Ce film aux allures de documentaire est un chef d’oeuvre. N’ayons pas peur des mots. Réalisé par un cinéaste canadien quasiment inconnu de ce côté de l’Atlantique (Kim Nguyen), il devrait sortir ce mercredi dans quelques (trop) rares salles de cinéma françaises. Prix d’interprétation féminine au dernier Festival de Berlin, la jeune Rachel Mwanza incarne une enfant-soldat inoubliable.

 

Le scénario est tristement classique: des rebelles déferlent sur un petit village africain et kidnappent de jeunes enfants pour en faire des soldats. Pour s’assurer qu’ils ne chercheront pas à revenir sur leurs pas, ils les contraignent aux pires atrocités. La fidélité par le sang. Si on s’attend à voir autant de drames dans la vie d’un enfant-soldat, la vitalité dont elle fait preuve pour survivre, s’allier et aimer le bébé qu’elle porte est une heureuse surprise. 

 

Mais plus que l’histoire, c’est le sentiment d’authenticité qui donne au film toute sa valeur. On le doit, bien sûr, aux acteurs amateurs que Kim Nguyen a « trouvé » dans les rues de Kinshasa et qui campent des personnages plus vrais que nature. Mais surtout à une méthode de tournage originale qui laisse aux acteurs la possibilité de rester naturels et spontanés. Les scènes leur ont été présentées jour après jour sans que l’ensemble du scénario ne soit divulgué. Libéré de l’histoire, les acteurs ont laissé libre cours à leur imagination pour construire leurs personnages. L’ensemble donne au spectateur l’impression magique d’observer une tranche de vie plus vraie que nature.

De l’art brut au cinéma.

Date de sortie en France: 28 novembre 2012
Interdit aux moins de 12 ans – Durée du film: 1h30
Réalisé par Kim Nguyen, avec Rachel Mwanza, Alain Lino Mic Eli Bastien, Serge Kanyinda…

 

Rebelle




« L’enfant », terrible drame rural

Copyright : Guillaume Lavie

 

Pour imaginer cette création, Carole Thibaut s’est installée en résidence à Saint-Antoine l’Abbaye, commune de l’est de la France en 2009. Un village comme il en existe des milliers. A partir de témoignages reçus, elle crée son décor, une fiction où elle dénonce à quel point l’immobilisme des « honnêtes gens » (au sens auquel l’entendait Brassens), peut conduire aux pires horreurs. Ce texte est le premier volet d’un vaste projet baptisé « Les communautés territoires ».

L’Enfant – Drame rural part d’une métaphore biblique, celle de la destruction de Sodome (qui a été détruite, non pas pour le péché de sodomie qu’on y pratiquait comme il est courant de l’entendre, mais pour le mauvais traitement fait à des étrangers de passages, contrairement à la coutume antique de l’hospitalité). Ici, un enfant est abandonné de bon matin au pied de la ferme la plus isolée d’un village de l’Isère. Ses occupants (une idiote et son père) ne peuvent le garder et le confient au maire, qui le confie à sa sœur qui demande à sa femme de ménage d’en prendre soin. Au final, l’enfant se trouve à nouveau chez l’idiote, qui s’enfuira avec lui pour éviter qu’on ne le lui prenne de nouveau.

Tout au long de l’intrigue, on suit l’Enfant de main en main, le spectateur entre donc dans chaque foyer. Se retrouve du bon côté de la porte pour observer ce qu’il se déroule dans le salon des habitants, dans leur intimité, jusque dans les moindres détails du mobilier… Comment peuvent-ils être monstrueux au point de ne pouvoir garder un bébé quelques heures ? Finalement l’Enfant est prétexte à une fresque effroyable par sa vérité. On est effaré de ce que peut faire l’humain par égoïsme ordinaire. Et bien que ce thème paraisse évident, la façon dont il est montré est particulièrement étonnante.

De belles lumières, un dispositif scénographique ingénieux (qui ressemble à celui de « Ma chambre froide » de Pommerat) et une bande son nous plaçant dans un espace temps radicalement bouleversant font de ce drame un portrait qui semble terriblement réel. Monstrueusement réel. Sans pour autant tomber dans le réalisme gorgé de larmes et d’angoisses. Carole Thibaut a créé un monde dans l’écriture, elle arrive très bien à le faire rejaillir théâtralement, avec une pincée de cynisme grinçant bienvenue.

La création dure 2 h 15, et pourtant elle s’arrête au bon moment, à aucun instant cela ne semble long. Et elle réussit la prouesse de ne pas tomber dans la tragédie sanglante inutile. En choisissant de faire narrer la fin du drame à l’Enfant, elle ne se préoccupe pas de faire mourir chacun de ses personnages, elle se contente juste de nous montrer leur chute, leur vie en somme.

Les acteurs sont tous excellents dans ces rôles, bien marqués et, une fois de plus, tellement crédibles. Ce drame rural ne touche pas que ses protagonistes. Il est affreusement universel.

Pratique : Jusqu’au 27 octobre au théâtre la Tempête, La Cartoucherie de Vincennes, Route du Champ-de-Manoeuvre (75012, Paris) – Réservations par téléphone au 01 43 28 36 36  ou sur www.la-tempete.fr/ / Tarifs : entre 12 € (étudiants, chômeurs) et 18 € (plein tarif) – Du mardi au dimanche.

Durée : 2 h 15

Texte et mise en scène : Carole Thibaut

Avec :  Marion Barché, Thierry Bosc, Eddie Chignara, Sophie Daull, Emmanuelle Grangé, Donatien Guillot, Fanny Santer, Boris Terral.

Tournée :

  • Le 8 novembre, ATP de Millau
  • Le 10 novembre, ATP de Dax
  • Le 13 novembre, ATP d’Aix-en-Provence
  • Le 14 novembre, ATP d’Avignon
  • Le 16 novembre, ATP de l’Aude, Pennautier
  • Le 20 novembre au théâtre Roger Barrat, Herblay
  • Le 22 novembre, ATP d’Uzès
  • Le 24 novembre, ATP de Nîmes
  • Le 27 novembre, ATP d’Epinal
  • Le 30 novembre à l’Apostrophe, Scène Nationale de Cergy-Pontoise
  • Le 8 janvier, ATP d’Orléans
  • Le 18 janvier, ATP de Roanne
  • Le 22 janvier, ATP de Poitiers
  • Le 1er février à la Ferme de Bel Ebat, Théâtre de Guyancourt
  • Le 16 avril, ATP de Lunel
  • Les 27 (ou 28) juillet au festival « Textes en l’air » de Saint-Antoine l’Abbaye



La Porte des Enfers, Laurent Gaudé

La Porte des Enfers


La mort est sans doute le dernier refuge de la religion dans nos sociétés contemporaines.


La mainmise sur la cellule familiale s’estompe peu à peu, les positions d’une grande partie de l’Eglise sur la sexualité de la société semble anachronique.

La vie sur Terre n’est quasiment plus considérée comme un passage obligé avant d’atteindre un autre monde, on a vu ainsi se développer des sociétés entières basées sur le désir, la consommation, la jouissance quotidienne et polymorphe.


Mais la mort reste propriété de l’Eglise. Les cimetières ne sont-ils pas les derniers lieux à connotation religieuse qui subsistent dans nos sociétés, aux côtés des lieux de culte ?
Ils représentent d’ailleurs un culte à eux seuls : le culte des morts.


C’est à ce culte qu’est consacré le roman de Laurent Gaudé, La Porte des Enfers.


Au commencement est un enfant, Pippo de Nittis. Jeune Napolitain, du haut de ses 6 ans, il a toute la vie à découvrir. Et pourtant, c’est sa vie qui va brutalement le quitter, un matin de marché, dans les rues animées de Naples. Un matin de marché ordinaire. Un matin où il craint d’être en retard à l’école. Un matin. Naples.

Des règlements de compte. Des échanges de tirs. Une balle perdue. Un enfant. Pippo.


Cette vie qui s’achève prématurément laisse Matteo et Giuliana désemparés. Ensemble et pourtant si seuls. Aucune communication n’est plus possible entre eux. Le spectre de leur fils se dresse désormais comme une véritable barrière dans leur couple.

Chaque regard qu’ils échangent, chaque parole qu’ils souhaiteraient prononcer viennent se heurter à la vision de leur enfant mort. Seules deux choses pourraient les réunir à nouveau : que leur fils leur soit rendu, ou que leur vengeance soit consommée.

Décor posé. Le moment est venu de plonger dans l’aventure.


L’auteur joue avec les nerfs et les émotions de son lecteur. L’atmosphère étouffante, la chaleur, la puanteur, la saleté.
Dans la lignée de L’Etranger et de La Peste de Camus, du Soleil des Scorta et de La Mort du Roi Tsongor du même Laurent Gaudé, le lecteur est opprimé, il suffoque.
Il ne reprend son souffle qu’une fois le livre terminé, l’histoire achevée, les secrets enfouis dans un oubli volontaire.

Et pourtant, dès que l’occasion se présente de replonger dans les univers oppressants que dépeint Laurent Gaudé, je ne peux m’empêcher d’y aller à pieds joints ! Et toujours sans le moindre regret !


Laurent Gaudé, La Porte des Enfers, éditions Actes Sud
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ink : il faut sauver le croque-mitaine

Qui n’a jamais eu peur du croque-mitaine ? Celui qui se cache sous notre lit, attendant les heures les plus noires de la nuit pour sortir et nous emmener au pays des cauchemars. Chris Nolan nous a servi un film magnifique avec plein d’effets spéciaux pour nous faire comprendre que le croque-mitaine était dans notre esprit. 1 an auparavant, Jamin Winans explorait déjà les mêmes sentiers, avec moins de budget, certes, mais une réflexion plus poussée.
Oubliez tout ce qu’on vous a raconté jusqu’à présent, il ne sert à rien de serrer les paupières ni de se cacher sous la couette. Le croque-mitaine est là, et il n’a rien à perdre.


« FUCK! » je crois que c’est la première réplique de ce film. « FUCK! », voilà ce que je pense aussi, parce que c’est tellement difficile d’en parler : complexe et visuel, avec une histoire à raconter et une bande-son magique. Comme quand on était petits.

Quand j’étais petite, j’avais peur. D’ailleurs, je laissais la lumière allumée super longtemps (et pas que pour lire des livres tard dans la nuit dans le dos de mes parents, hein !) et j’avais un rituel pour être sûre de ne pas me faire emporter au pays des cauchemars.
Et j’ai grandi.

Emma n’a pas cette chance, elle n’a pas encore grandi, et malgré la lumière allumée, malgré ses yeux bien serrés, et bien qu’elle tente de ne plus respirer, ink l’emmène. C’est un voyage dans un monde parallèle, un voyage dans la tête d’un homme brisé ou dans l’esprit d’une petite fille esseulée, un voyage dont les fins ont déjà eu lieu.
On recherche l’alternative. On veut sauver Emma, et pour la sauver, il faut sauver son père, et en sauvant Emma, on veut sauver ink, en vrai. Et sauver ink…

Il s’agit d’un sujet maintes fois exploré, une histoire assez simple en fin de compte : un homme qui perd femme et enfant, une enfant délaissée qui veut juste que son père entre dans le jeu. C’est une quête pour chacun d’eux.

Des flash-back et des flash-forward, des couleurs altérées, du flou maintenu tout le long d’un film difficile à suivre tant les scènes d’actions – des combats à mains nues assez violents et très bien chorégraphiés – et de contemplation (marre du cliché qui oppose le « zen-forêt » au « stress-city », mais faut croire que ça marche encore dans l’imaginaire collectif) se superposent.

Vous perdez le fil ? C’est fait exprès : on ne sait plus qui est le méchant, enfin si, il y a toujours le Méchant, celui qui, s’il ne fait pas peur à cause de sa laideur comme le croque-mitaine au long nez crochu, reste le personnage le plus angoissant, avec son double visage, les sautes d’images, et son sourire froid. Le Méchant représenté par plusieurs. Les Incubus.
Et les Gentils ? Les Conteurs bien sûr, ces êtres presque humains et lumineux, qui nous redonnent des forces par la magie des rêves qu’ils nous apportent. Et le déjanté Eclaireur aveugle, héhé, qui a un sens du rythme assez funky. (D’ailleurs la scène où tout son art se révèle me rappelle assez les scènes où la Mort se rattrape dans Destination finale, avec l’idée du destin ou de la fatalité qui met en scène et fait s’enchaîner les événements. Fatalité qui peut être très facilement personnifiable.)

Mais en vrai, ce n’est pas une petite fable manichéenne que nous retenons. C’est un vrai conte pour enfant et pour adulte.
L’Incubus, celui qui nous donne cauchemars et désespoir, de même que les Conteurs, ne viennent que si nous leur donnons du grain à moudre. Le croque-mitaine, c’est vous et moi. Et ce que nous sacrifions avec tant d’énergie à nos idées noires et notre volonté d’autodestruction, c’est vous, moi, et surtout ceux que nous aimons.

Belle morale, non ?