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[Théâtre – Avignon] Où vont « Les choses qui passent » ?

Abke Haring (Elly) et Aus Greidanus Jr. (Lot) dans « Les choses qui passent » m.e.s. par Ivo Van Hove © Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon

Le récit transgénérationnel de Louis Couperus, fabuleusement mis en scène par Ivo Van Hove, propose une immersion dans une famille rongée par un lourd secret. Parmi « Les choses qui passent » il y a surtout la jeunesse. L’angoisse universelle de vieillir magnifiée par une certaine lenteur, peut s’avérer trop opaque pour les jeunes générations.

Qu’est-ce que la vieillesse ? Le metteur en scène belge et directeur artistique du Toneelgroep d’Amsterdam ne l’explique pas, il le montre. Les comédiens plient le dos, traînent une patte folle ou claudiquent sur une canne. Un couple de petit vieux se poste à la fenêtre chaque jour qu’il leur reste, parfumant l’atmosphère d’un « je-ne-sais-pas-trop-quoi » hérité de Beckett. De la décrépitude ? Et si tout ces vieillards assombris tiennent le choc, c’est car depuis soixante ans, ils ruminent une histoire sordide, plus ou moins bien cachée.

La veille de leur mariage, deux époux s’aiment juste « bien ». Miné par un amour excessif pour sa mère, Lot n’est pas un sensuel et Elly fera avec. La tendresse est entre eux de l’ordre de l’amitié mais l’on assiste tout de même à une parade nuptiale complètement déjantée.

Une mère dépendante de l’affection des hommes cache la frustration de n’avoir pas eu de père. Les liens de cette famille sont nocifs et dérangent, néanmoins ils sont forts. Les plus âgés s’agglutinent en bande, tous unis par le noir des vêtements qu’ils portent. Les moins vieux sont eux aussi, vêtus d’habits de deuil, mais se déplacent à deux, et bien plus souvent seul. Cela fait partie des images, des allégories, qu’un néophyte aimerait pouvoir saisir d’emblée.

Dépeignant ce qu’il y a de pire au sein d’une famille, et ce avec une grande force notamment corporelle, l’adaptation d’Ivo Van Hove fait l’unanimité en cette 72e édition du Festival d’Avignon. Pourtant elle laisse de marbre quelques esprits plus jeunes qui, tout à fait concernés par le temps qui passe, auraient pris du plaisir à s’identifier. À trop esthétiser la froideur des personnages, un spectateur novice ne peut s’intéresser au plus profond du propos. Ces « choses qui passent » pourtant, sont bien universelles.

« Les choses qui passent » m.e.s par Ivo Van Hove d’après un texte de Louis Couperus
Jusqu’au 21 Juillet dans la cour du Lycée Saint-Joseph, Avignon
Plus d’informations sur https://www.theatre-contemporain.net/spectacles/




[Théâtre] Une Mouette qui nous prend au vol et s’abat sur nous

Photo : Clément Carmar

Le Théâtre de la Bastille accueille La Mouette, une pièce de Tchekhov mise en scène par Thibault Perrenoud, qui nous en offre une version décapante, saisissante de réalité et toujours en prise avec l’actualité.

Dans la pièce de Tchekhov, la mouette n’est autre que Nina, une jeune femme qui va périr d’amour. D’abord aimée de Constant qui lui écrit une pièce, la jeune actrice qu’elle est va s’enfouir avec l’amant de la mère de celui qui l’aime et qui lui abattra une mouette. Comme d’habitude chez Tchekhov, tous sont tourmentés, se cherchent, fuient mais reviennent confrontés à ce qu’ils sont. Dans la mise en scène signée par Thibault Perrenoud, les personnages sont ceux de Tchekhov mais comme actualisés, transposés à aujourd’hui et nos vies. Dès leur entrée sur un plateau où le public est installé dans un système en quadri-frontal, ils se révèlent proches de nous, ils jouent des sentiments que l’on connaît tous, ils sont assis parmi nous et dans une temporalité qui nous échappe tant cette pièce ainsi montée s’impose comme une évidence, on est balloté d’émotion en émotion, de la détresse de chacun à la mort annoncée de l’un d’eux.

Même s’il prend des risques avec le texte original, le metteur en scène crée un spectacle épuré, marqué par des fulgurances qui nous heurtent en plein vol si bien que l’âme de Tchekhov plane toujours au-dessus de nous, et ce malgré le choix d’un franc-parler déroutant au départ. Là où Thibault Perrenoud comme sa troupe d’acteurs excellent, c’est aussi dans ce qui n’est pas dit mais que l’on voit ou que l’on entend quand même. Car entre les répliques ou pendant, les situations semblent se vivre « pour de vrai », toujours il se passe des choses hors-scène, et toujours les frustrations de chacun – amoureuses ou artistiques – sont prégnantes.

En deux heures à peine, on éprouve les vies des personnages, leurs difficiles relations entre eux et avec le monde qu’il faut habiter. Par de multiples clins d’œil intelligents à notre actualité, le chômage, l’écologie, le terrorisme, le metteur en scène nous achève et montre qu’avec peu de choses il reconstitue tout un monde et un tissu social qui nous interpellent. Et plus le temps passe, plus comme cette mouette abattue, spectatrice constante abandonnée en bord de plateau, on y laisse quelques plumes.

« La Mouette », de Tchekhov, mise en scène Thibault Perrenoud, actuellement au Théâtre de la Bastille, 76, rue de la Roquette, 75011 Paris. Durée : 2h. Plus d’informations et réservations sur http://www.theatre-bastille.com/saison-16-17/les-spectacles/la-mouette




« Scènes de violences conjugales » à la Tempête : Du geste amoureux à la première claque

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Photo : Mandarine.

Après deux ans de travail d’enquête au côté d’associations, de victimes et une immersion dans la lutte associative et judiciaire mise en place contre les violences conjugales, Gérard Watkins a écrit et mis en scène « Scènes de violences conjugales », oeuvre semi-fictive actuellement au Théâtre de la Tempête. Entre écriture de plateau et sujet proche du fait divers, le metteur en scène crée un spectacle saisissant pour comprendre et lutter contre la montée du geste violent au sein du couple et par extension, d’identifier les victimes directes et indirectes de ces violences, à commencer par les femmes, puis les enfants.

Sur un plateau en forme de triangle inversé donnant lieu à un espace tri-frontal et sans décor, entre d’abord une jeune femme qui prend place derrière une batterie, l’instrument surplombe la scène et n’aura de cesse de ponctuer la pièce, suggérant dès le départ une atmosphère marquée par la violence du geste.

Quand Annie rencontre Pascal, elle est en situation de précarité, elle vit chez ses parents et enchaine les entretiens ratés, notamment à cause du RER, toujours en retard. Pascal, sur le même quai qu’Annie, est un photographe dans une situation plus aisée, même s’il enchaine les échecs. D’un autre côté, Rachida est une jeune étudiante musulmane qui vit dans une cité, elle est dans un contexte familial compliqué quand elle rencontre Liam, jeune homme venu de Châteauroux sans rien sinon le désir d’une vie stable. De là, les couples emménagent ensemble chacun de leur côté, bercés par les idéaux d’une vie commune heureuse qui leur ferait échapper à leur passé et non reproduire leurs souffrances.

Avec beaucoup d’habilité et des comédiens bouleversants de spontanéité, Watkins plonge le spectateur dans le quotidien des personnages pour lesquels on se met à craindre le pire. Grâce à la création sonore et lumineuse, on guette le basculement dans la violence, impulsé par un quotidien qui, d’une certaine manière, pourrait être le nôtre. De Rachida qui ne sait pas aider Liam à monter une étagère Ikéa à Annie qui oublie comment on fait une mayonnaise, une tension s’installe, jusqu’à frôler l’insoutenable. Les femmes, en dépit de leur incompréhension, prennent le rôle de victime, une condition dont elles ne sortiront qu’après avoir vécu le pire, ce sera la perte d’un enfant pour l’une, et l’envie de disparaître pour l’autre.

Gérard Watkins parvient alors à créer un spectacle coup de poing qui invite à repenser le secours donné aux victimes et le manque de moyens déployé pour prévenir les heurts quand on sait que beaucoup de personnes violentes ne font que reproduire ce qu’elles-mêmes ont déjà subi. Lorsqu’on sait que rien qu’en France, quelques 143000 enfants vivent dans un foyer où des violences ont déjà été signalées, et qu’une femme décède tous les trois jours sous les coups de son conjoint. Par une fiction au plus près de la réalité et d’une actualité quotidiennement ponctuée par ce genre de faits dramatiques, « Scènes de violences conjugales » est un spectacle qui peut être salué pour le silence qu’il permet de lever, sinon de rompre.

« Scènes de violences conjugales », texte et mise en scène de Gérard Watkins, du 11 novembre au 11 décembre 2016 au Théâtre de la Tempête, Cartoucherie, Route du Champ de Manœuvre, 75012 Paris. Durée : 2h. Plus d’informations et réservations sur https://www.la-tempete.fr/




Avignon IN 2016 « Les Damnés » : Ivo van Hove fait trembler la Cour d’Honneur

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Après vingt-trois ans d’absence au Festival d’Avignon, la Comédie-Française signe son grand retour dans une adaptation du scénario de Visconti « Les Damnés » mis en scène par Ivo van Hove. Dès les premières minutes de la représentation, le pari est gagné, les comédiens sont au sommet et la mise en scène n’en est pas moins grandiose de beauté et d’intensité.

La pièce se déroule sur un immense plateau orange surmonté d’un écran presque aussi grand qui, comme Ivo van Hove en a l’habitude, va servir tout le long à projeter et des images d’archives, et à mettre en abyme ses personnages. Prenant place autour du plateau central, les comédiens se changent à vue, alors que l’espace scénique grouille de petites actions simultanées, chaque personnage est filmé en gros plan et un portrait nous en est fait sans qu’il n’y ait de conflit entre ce que la scène et l’écran nous montrent. Nous sont ainsi présentés les personnages de la famille Essenbeck, grande bourgeoisie industrielle allemande fortunée grâce à son entreprise de sidérurgie qui lors de la montée du nazisme ne verra d’autre possibilité que de servir le pouvoir, croyant sauver la dynastie familiale.

À partir de ces présentations qui donnent à voir les griefs de chacun envers les autres et laissent une tension glaciale qui restera jusqu’à la fin du spectacle, Ivo van Hove parvient à dire l’horreur du régime, et la cruauté de ces individus. Dans cette lutte de pouvoir marquée par une montée du nazisme suggérée par des figurants et des images comme le Reichstag en feu et les grands autodafés de 1933, des personnages se démarquent. Le fils de la Baronne Sophie (Elsa Lepoivre) qui se retrouve au cœur du conflit familial, Martin (Christophe Montenez), s’impose rapidement comme le personnage le plus sombre de l’intrigue, que ce soit dans sa démarche ou ses penchants incestueux et morbides. Dans un chaos qui évolue à l’image du nazisme, des questions comme la collaboration forcée ou inconsciente de l’industrie en temps de guerre sont abordées, vers une pensée plus globale de notre actualité. Le recours du metteur en scène à la vidéo, loin de continuer le film de Visconti sur scène et d’envahir le jeu des comédiens, est maîtrisé et saisissant comme lorsqu’elle décuple la présence scénique des personnages ou qu’elle accompagne la marche funèbre de chacun des membres de la famille vers sa tombe. Car l’une des créations les plus saisissantes de cette mise en scène vient de la disposition de tombes en ligne le long de la scène, toutes ouvertes, elles annoncent la mort de ceux encore debout sous nos yeux. D’une façon habile et toute à la fois brutale le spectateur est confronté à l’idée de la mort que l’écran viendra amplifier étant donné que chaque mise au tombeau sera filmée en gros plan, donnant ainsi à voir les visages révulsés des personnages effrayés.

En suivant le film de Visconti mais en misant sur une esthétique aussi sobre, Ivo van Hove interroge le mal avec d’un côté les loges des comédiens se préparant à vue, et de l’autre ces tombes avec les personnages, mourant de même à vue, comme si le sens de lecture d’une telle soif de pouvoir en ces temps de nazisme était fatalement celui qui se dessine sous nos yeux. Pris entre la verticalité de l’écran et l’horizontalité de la scène, les comédiens sont sidérants et n’étouffent jamais derrière des procédés aussi esthétiques brutaux que la scène finale. Par le prisme de la famille Essenbeck et de l’annonce du patriarche qui décide en dépit de son opposition à Hitler de s’y rallier pour sauver l’entreprise sidérurgique, la montée du national socialisme reste toujours manifeste.

Jusqu’à la dernière image qui heurte le spectateur de plein fouet et fait trembler la Cour d’Honneur, Ivo van Hove se hisse à nouveau au sommet et propose une mise en scène d’une sublime cruauté interpelant le public quant à sa bouillante actualité. Les raisons qui poussent les industriels à se rallier au pouvoir sont peut-être diverses et irréductibles à un seul discours émanant du contexte du nazisme mais quoi qu’il en soit en temps de conflit, comme l’écrivait Primo Levi, « Ceux qui sont dangereux, ce sont les hommes ordinaires, les fonctionnaires prêts à croire et à obéir sans discuter« .

Les Damnés, d’après le scénario de Luchino Visconti, Nicola Badalucco et Enrico Medioli, avec la troupe de la Comédie-Française : Sylvia Bergé, Éric Génovèse, Denis Podalydès, Alexandre Pavloff, Guillaume Gallienne, Elsa Lepoivre, Loïc Corbery, Adeline d’Hermy, Clément Hervieu-Léger, Jennifer Decker, Didier Sandre, Christophe Montenez, Sébastien Baulain, Basile Alaïmalaïs.

Festival d’Avignon, Palais des Papes, 84000 Avignon, 04 90 14 14 14, jusqu’au 16 juillet, durée 2h10.

Du 24 septembre au 13 janvier 2017 à la Comédie-Française.




Avignon OFF 2016 : « Kennedy », au nom du père, du fils, et des États-Unis !

Photo : Aude Vanlathem
Photo : Aude Vanlathem

Avec Kennedy, Ladislas Chollat, salué en 2014 pour sa mise en scène de Le Père de Florian Zeller qui avait remportée pas moins de trois Molières, propose une immersion dans les rouages familiaux et politiques – pléonasme dans leur cas – de la famille Kennedy.

Le public, habité par des images de l’assassinat à Dallas en 1963 de JKF, d’une Jackie Kennedy en tailleur Chanel et au sex-appeal de l’ex-président et de ses frères, découvre la puissante dynastie sous un nouveau jour. Avec des symboles efficaces comme le drapeau américain et des documents d’archives ou de films typiquement américains, le metteur en scène plante le décor d’une suite d’hôtel composée de deux panneaux servant souvent d’écrans, sans pour autant sombrer dans un effet Powerpoint qui avait caractérisé sa mise en scène d' »Encore une histoire d’amour », au Studio des Champs-Elysées cette saison. Du début à la fin du spectacle y sont en effet projetés des portraits de la famille Kennedy dont JFK et son frère Bobby, fiction et réalité se mélangent, parfois le président s’adresse à nous, mais l’effet House of Cards n’opère pas.

Les Kennedy, c’est d’abord un clan et beaucoup d’argent. On pense alors aux prochaines élections Clinton-Trump et à cette politique américaine oligarchique qui ne bouge pas, pour autant, les Kennedy restent un cas unique. Joseph Patrick Kennedy, le patriarche, rêvait déjà de briguer la Maison Blanche de sorte qu’il parvint à éduquer ses fils avec ce seul dessein, planifiant ainsi l’accession au pouvoir minutieusement programmée de sa descendance. Dès le départ, le spectacle s’inscrit dans ce rapport à la filiation et au « projet Kennedy ». Dépeint sous un angle inhabituel, JFK est présenté comme un homme malade, angoissé, fragile, cassé par les rêves de son père et paranoïaque – tout dans les attitudes du comédien traduit ces inquiétudes. Au duo des Kennedy vient enfin s’ajouter une femme, tantôt Jackie, tantôt Marilyn, elle est surtout aux yeux du président une potentielle espionne. Dans une atmosphère qui accentue la décadence, notamment sexuelle de JFK sans cesse sauvé par le clan, le pouvoir et la politique sont présentés sous un jour bien sombre. La fortune familiale, soupçonnée de s’être constituée sur fond mafieux y est remise en question et par extension, les bases du pouvoir à l’américaine. Si les acteurs sont convaincants, leur jeu manque toutefois de ce qui fait l’imaginaire social des Kennedy, à savoir un charisme à l’américaine et une allure séductrice.

Au demeurant, la qualité du texte et de la mise en scène réside dans le fait que les Kennedy sont, certes démystifiés, mais pour mieux servir le mythe. Comparés aux Atrides, à ces dynasties grecques et à ce qui fait une grande famille de pouvoir, quelque chose d’héroïque ressort de la mort annoncée du président. À la manière d’Achille, JFK a fait le choix de prendre le risque de mourir et d’entrer au panthéon des présidents adorés plutôt que d’avouer son infirmité et de rester sur ses gardes. Peut-être plus encore que le clan Kennedy, c’est un discours sur la politique américaine qui émerge de cette création, en écho avec les prochaines présidentielles, on ne peut s’empêcher de penser que ces élections n’ont rien de plus à proposer que du scandale et un pouvoir appuyé par l’argent déjà bien en place. Aux États-Unis, la présidence est une affaire de familles.

Kennedy, de Thierry Debroux, mise en scène de Ladislas Chollat, avec Alain Leempoel, Dominique Rongvaux et Anouchka Vingtier.

Festival d’Avignon, Théâtre du Chêne Noir, 8bis, rue Sainte-Catherine, 84000 Avignon, jusqu’au 30 juillet, relâches les lundis, 15h, durée 1h30.




L’humour plus fort que la mort

Que faire quand l’un de nos proches nous supplie de mettre fin à sa vie pour ne plus souffrir ? C’est la question que se posent Tal Granit et Sharon Maymon dans leur dernier long-métrage Fin de partie. Sujet sensible à l’heure des nombreux débats sur la fin de vie, le film traite avec humour et drame des questions et dilemmes que peuvent nous réserver nos dernières heures.

Et si parler d’un sujet sérieux comme la mort avec humour permettait de mieux faire passer un message ? C’est en tout cas ce qu’ont eu l’air de penser les réalisateurs, Tal et Shaon quand ils ont écrit le scénario de Fin de partie. À la frontière de la comédie et du drame, le film raconte comment une bande de pensionnaires d’une maison de retraite va mettre au point une machine à mourir dans le but de soulager des malades en fin de vie. A la manière d’anges exterminateurs, ils se baladent de maisons en maisons pour apporter libération à ceux qui la réclament. Une veuve, un vétérinaire, un policier et un inventeur, tel est le visage de cette nouvelle génération du crime organisé.

© Eurozoom
© Eurozoom

Un sujet sinistre et pesant duquel se dégage pourtant, légèreté et jovialité, confirmant l’adage, selon lequel on peut rire de tout. Rire, pleurer, se révolter, autant d’émotions qui nous traversent, se répètent et se mélangent au travers de scènes drôles et tristes à la fois. On y parle de la mort avec humour, de l’amour après la mort, toujours avec subtilité et ce qu’il faut de justesse pour dispenser le spectateur du pathos qui entoure la question dans l’actualité. Entre l’absurde et l’originalité, le scénario nous surprend et nous amène à sourire quand, par exemple, une coupure de courant vient contrecarrer les plans d’une vieille dame qui s’apprêtait à se donner la mort.

Ce sont surtout les personnages qui nous étonnent et nous tirent le sourire à chaque minute. Des acteurs pour l’occasion âgés, que l’on a peu l’habitude de voir au cinéma et qui, placés dans des situations cocasses composent la formule gagnante. À la fois touchants et surprenants, ils campent chacun un rôle qui permet de comprendre l’évolution du débat sur la fin de vie dans la société : la femme dévouée qui ne supporte plus de voir son mari souffrir, le meilleur ami indécis, l’opposante catégorique, le médecin impartial etc. On déambule au travers des histoires de chacun afin de comprendre motivations et fondements de leurs actions.

Pourtant, passé l’effet de surprise, le décalage et les scènes amusantes, le film traine en longueur. On regrette une réalisation à l’image de l’ambiance des maisons de retraites : endormie. La caméra tourne et prend trop le temps de fixer visages et expressions. Beaucoup de silences et de moments vides viennent graduellement encombrer et couper l’envolée des débuts prometteurs.

Un film argument qui tente de conduire à l’ouverture et l’acceptation du débat sur l’euthanasie qui, malgré quelques imperfections, mérite d’être vu lorsqu’on s’intéresse à ces questions.

 « Fin de partie », de Tal Granit et Sharon Maymon, sortie au cinéma le 3 juin 2015.




Marche ou crève (heu ! S’il vous plaît)

Bonjour M’sieur Dame, excusez moi de vous importuner une nouvelle fois, mais vu que vous préférerez me lire plutôt que d’aller sauver le monde… hein ! Canaillou(se) !

J’va vous conter un peu ma vie, en effet je viens de finir une course à pied. Et là vous vous dites oh non !  Il ne va tout de même pas oser nous vanter l’immense satisfaction d’engloutir 40 bornes en mini short moule-gonades, éclairé par ampoules aux pieds avec option néon 40 000 watts et des cuisses en feu mais épilées (rapport à mon dernier article, merci pour ceux qui suivent).

Que nenni ami lecteur ! Cela n’aurait rien à voir avec votre blog préféré. Je viens tout humblement d’achever la course la plus mortelle au monde, assis dans mon fauteuil Louis XV (prononcez Poäng en suédois). Il s’agit bien sûr de Marche ou Crève de Richard Bachman (alias Stephen King ou l’inverse).

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Achever est le bon terme car dans ce roman à l’eau de sueur écrit en 1979, tout participant marchant en-dessous de 6,5 km/h est exécuté après 3 avertissements (tout de même, grand seigneur !). Le but du jeu car il s’agit d’un genre de télé-réalité avant l’heure mais sans les SMS, est donc de terminer dernier (survivant), il ne doit en rester qu’un, comme dirait tonton MacLeod. Le vainqueur reçoit une très grosse somme d’argent ainsi que la réalisation d’un «vœu».

Au premier abord, ainsi qu’au deuxième, ce genre road book peut sembler long, les pages s’égrainent semant les corps des jeunes concurrents, terreau d’un fertile vainqueur (oh c’est beau). Pour nous aider à nous repérer, le récit se focalise sur Ray(mon) Garraty. Au travers de ses rencontres, ses doutes, ses rêves, nous sommes plongés au cœur de la course, devant une foule en liesse massée en liasse sans se lasser (oups, mon lacet s’est défait !). Au-delà de la douleur, lorsque le mental vous a abandonné depuis longtemps, la victoire n’est plus l’objectif, seul l’espoir d’une délivrance vous tient encore debout. Malgré tout, des amitiés sont possibles, voire même une certaine entraide contre nature entre les candidats.

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Extrait 1 : « Ralentissons un peu, dit Mc Vries. On va y aller mollo. Rejoindre Baker. Nous entrerons dans Augusta ensemble. Les Trois Mousquetaires. Qu’est-ce que t’en dis, Garraty ?»

Extrait 2 : « – Nous voulons tous mourir, déclara-t-il. C’est pour ça que nous faisons ça. Sinon pourquoi, Garraty ? Pourquoi ? »

Extrait 3 : « – Je vais marcher à te crever. »

Le rythme de la fin s’accélère comme si l’auteur était pressé d’en finir, on entend presque Maman King crier à son Stephen de fils : « dépêche-toi, ta soupe va refroidir ! » C’est un petit peu dommage car l’ensemble du roman est parfaitement équilibré.

Pour conclure, je me pose la question : Ne sommes-nous pas déjà engagés dans cette course ? Vous avez 3 heures je relève les copies à la fin!

Je vous laisse là-dessus, vous pouvez retourner sauver le monde, j’ai ouï dire que c’était un job à temps plein.

Informations :
Marche ou crève – Stephen King (Richard Bachman)
Le livre de Poche – Fantastique
Code ISBN : 978-2-253-15139-5
Prix public : 6,60 €




Week-end – De cendres et de papier

Dans un pays en guerre, deux fossoyeurs sont chargés de brûler les morts. Avec les cadavres, ce sont les paumes de leurs mains qui s’échauffent, leurs cheveux qui grésillent, les illusions du nettoyage qui s’envolent un fumée. Une femme, laissée pour morte, se relève et se joint à eux. Elle se met à travailler à leurs côtés mais à sa manière. Les morts, elle les recoiffe, leur caresse les joues, déplie leurs membres et leur parle. D’ailleurs, elle ne parle qu’à eux.

Cette pièce de théâtre de Laurent Gaudé, publiée dans la collection « Papier » d’Actes Sud, est une grotesque tragédie qui donne à lire l’indicible. Le savon, la chaux, la fumée pour dire la douleur, l’horreur et le néant. Inspiré par le témoignage d’une réfugiée kosovare, Laurent Gaudé prouve ici que les tragédies du 21e siècle n’ont rien à envier aux drames antiques.

J’ai longé des routes,

Traversé des terres que je ne connaissais pas.

J’ai fait saigner mes pieds.

J’ai erré longtemps jusqu’à atteindre, un jour, le haut de la colline.

Je me suis arrêtée.

A mes pieds,

Sur des kilomètres, à perte de vue, se tenait un campement.

Un amas immense de tentes et d’abris.

Une ville entière d’enfants pieds nus et de réfugiés.

Je suis restée là, à les contempler.

J’ai embrassé du regard cette foule qui se tenait serrée.

Et je suis descendue, lentement, au milieu des miens.

 

Cendres sur les mains
Laurent Gaudé
Actes Sud-Papiers
42 pages, 7,50 e

 




Walking Dead – Apocalypse now

Poltrons et pétochards cette série n’est pas pour vous. « The Walking dead » est une série américaine (diffusée sur AMC) se déroulant dans la banlieue d’Atlanta peu après un énorme cataclysme cabalistique. Une atmosphère de fin du monde plane et transforme le paisible quotidien de citoyens lambdas (ni trop gentils ni trop méchants) dans un chaos morbide où les morts ne sont pas tout à fait morts et où les vivants ont bien du mal à le rester. Les morts-vivants (en anglais living dead) donc, sont épouvantablement nombreux et bien que dans un état de putréfaction atrocement avancé, ils sont toujours en quête de chair fraîche.

Vous n’êtes pas sans remarquer la dynamique classique des films de zombies et autres morts-vivants, mixée cette fois à la thématique très en vogue de l’apocalypse.

Comme pour le comic book de Robert Kikman dont est issue la série, certaines scènes sont graphiques jusqu’à écœurement, les plans sont évocateurs, sanguinolents et pas très poétiques : y aura de la cervelle sur les murs, vous êtes prévenus. La série est cependant jugée moins trash et moins cruelle que la BD ; pourtant, au fur et à mesure des épisodes une ambiance malsaine colle aux basques de notre petit groupe de survivants.

Ca s’arrête là pour la ressemblance puisque là série prend, à juste ou à mauvais titre, des libertés vis-à-vis du comic.

« The Walking Dead » n’est pas qu’un cache-cache haletant avec des charognes patibulaires et agonisantes. De telles performances à l’audimat outre-Atlantique ne pourraient se justifier ainsi. Si la critique est partagée, l’audience elle, est bonne et c’est certainement à mettre au crédit de la tension et de l’angoisse véhiculées par les protagonistes bel et bien vivants de la série. Le fil rouge des épisodes est l’honnête petit shérif du conté de Kentucky (Andrew Lincoln) qui mène sa barque sur les rives du Styx en compagnie de camarades d’infortune de tous horizons. Dans le cadre hostile de leurs refuges précaires s’entament un huis clos avec des problématiques bien humaines elles. Leadership, amour, trahisons sèment la zizanie au pays des zombies et emberlificotent les stratégies de survie.

Par ailleurs, on peut voir au travers de cette série une fable moderne sur notre monde trop gourmand en énergies fossiles.
Mais surtout, ces épisodes sont porteurs d’une réflexion sur l’évolution des rapports humains et des comportements dans un monde où cadres sociaux et juridiques classiques ont volé en éclat. Ce « retour à la nature » que vivent les protagonistes est, à l’instar de celui décrit par Hegel, fait de « violences et d’injustices » hurlantes.

Ainsi, même si l’intrigue manque un peu de finesse et que la fin de la saison 1 souffre de quelques lenteurs narratives, le frisson et les rebondissements sont là.

Une petite dose d’adrénaline et d’hémoglobine; voici le trailer.

L’adaptation au format série est réalisée par Frank Darabont qui était aussi le réalisateur de La ligne verte.

S’il fallait le comparer à la vague de films « survivalistes », nous pourrions convenir que « The Walking dead » est :

  • moins sombre que « La route » tiré du livre de Cormac McCarthy et porté au cinéma par John Hillcoat,
  • plus violent que « Je suis une légende » de Francis Lawrence, mais surtout avec plus de personnages…,
  • plus urbain que « Seul au monde » avec Tom Hanks,
  • moins surnaturel que « La guerre des mondes » avec Tom Cruise,
  • moins apocalyptique que « 2012 », pas d’effets spéciaux hallucinants où la statue de la liberté et tous les grands monuments mondiaux symboliques sombrent, s’écroulent… avec fracas.

Et s’il fallait analyser « The Walking dead » aux regards des films d’horreurs, la série est :

  • moins bestiale que « 28 jours plus tard » de Danny Boyle,
  • plus réaliste que dans « Le Territoire des morts » de George Andrew Romero, pour ce qui est des zombies,
  • définitivement plus effrayante que « Scary movie »…



[Si je t’attrape …] A mourir de rire !


Si je t’attrape, je te mort ! Oui, bon, encore un titre avec une faute d’orthographe. On n’en est plus à ça près avec la série des « … m’a tuer ».
Et puis, à y regarder de plus près, Les Blancs Manteaux, succès, prolongations = puce à l’oreille ! Et places au premier rang ! Oui oui, vous avez bien entendu, premier rang ! Celui où d’ordinaire, il faut prévoir le parapluie pour se protéger des attaques de particules buccales volantes, identifiées la plupart du temps.
Là, il n’en est rien. Totale maîtrise. Parfois une petite participation réclamée par les comédiens, mais vraiment rien de méchant. Autant dire, un bon premier rang !
Et c’est rassurés que nous entrons dans une heure de rire quasi continu, qu’il soit fou ou aux éclats !



Stef : Durant l’été 2010 la pièce d’Olivier Maille avait fait des débuts intimistes. Il se murmurait alors sous cape que le trio sur la scène du théâtre  « Les feux de la rampe » avait du talent et que les dialogues étaient piquants, depuis la pièce a tout simplement décollé (500 représentations à ce jour) et met le feu au théâtre des Blancs Manteaux, le jeudi, le vendredi et le samedi.

La banane, tous les spectateurs l’ont en sortant car on rit beaucoup de quiproquos en scène désopilante…

Ne dit-on pas que c’est dans les vieilles casseroles qu’on fait les meilleures soupes ? La trame de la pièce respecte cet adage.  Les thèmes sont universels : L’amour & la mort.

Cependant  on reste assez peu de temps dans la dimension consensuelle pour très vite s’engouffrer dans l’humour noir et juste ce qu’il faut de décalé.  Car voilà l’élément perturbateur qui pointe déjà le bout de sa faux : La mort, la vraie, en noir, celle qui est sensée foutre les jetons-les chocottes-la trouille quoi !

Si la mort pouvait m’être aussi douce …

Pierre : Qui ne rêverait pas de passer ne serait-ce que quelques minutes avec La Mort …
Juste histoire de se faire une idée.
Apprendre à connaître celle qui va nous accompagner pour le restant de notre vie … ou plutôt de notre mort.

Et là, autant dire que c’est la Mort que l’on souhaiterait rencontrer (si tant est que l’on souhaite jamais la rencontrer), celle qui serait capable de nous faire oublier qui elle est, et surtout … pourquoi elle est là !

A nous faire douter que c’est vraiment elle, qu’on doit faire erreur … Une blague douteuse, un comédien raté, une soirée déguisée, Halloween avant l’heure … Bref, les raisons seraient multiples !
Et pourtant, pour plagier le titre d’un roman de Robert Merle, « La Mort est mon métier » nous annonce-t-elle à mi-mot … La preuve en est, elle est chaussée Méphisto (merci Aldebert) !

Entre balbutiements, chansonnettes, cascades et autres bévues, le spectacle proposé par la Mort est tout bonnement magnifique ! (Coup de chapeau à Florent Chesné, en photo ci-contre)
Et oui, car c’est encore bien méconnu, mais la Mort a des mimiques !
Mais sans vivants, la Mort n’est rien … Allons faire un tour du côté de ses victimes du jour !


Stef : Chômeur, égoïste, flemmard, irritant c’est ainsi que le personnage de Franck apparait dans les premières minutes de « Si te t’attrape je te mort ». La scène introductive, dite aussi scène des Miels pops, est hilarante. En quelques phrases la situation est dressée, les spectateurs sont déridés, le décollage peut avoir lieu.

On découvre après l’entrée sur scène fracassante de la mort, que Franck a aussi des bons côtés…
A Paris le personnage est joué par Olivier Maille, comédien d’une expressivité rare faisant tout passer dans ces mimiques.
Avec une bonne présence scénique, Olivier Maille, ne se contente pas de donner la réplique à la mort, il est aussi le metteur en scène de cette pièce. Le sacré répondant de son personnage associé à une gestuelle burlesque très maîtrisée sont là pour faire monter la sauce. A ce petit jeu le tandem fonctionne très bien. Rajouté le sel apporté par le personnage de Caroline et vous aurez un trio qui carbure.


Pierre : Et autant dire que Caroline a démarré au quart de tour !
Une furie, une coloc détestable, une ex regrettée (et regrettable ?), une actrice ratée …
Bref, la femme idéale !
Et oui, on tomberait presque sous le charme (non, pas uniquement de la comédienne -Kim Schwarck ce soir là-, c’est le risque), mais de son rôle !


De la bonne humeur, de la voix, du punch ils en ont. Ils en veulent, ces djeunes. Une belle énergie sur scène à voir absolument si vous avez envie d’une pièce …
… Drôle sans être lourdingue
… Bien ficelée mais pas alambiquée
… Déconcertante d’efficacité

 

A voir à Paris, Toulouse, Montpellier en décembre
Une pièce à voir à la capitale mais aussi en province, une fois n’est pas coutume ! Alors, profitez-en, courez sur les sites de location de place, dans vos théâtres préférés, ou envoyez un gentil mail aux acteurs (résultat non garanti), et allez vite voir une représentation de « Si je t’attrape je te mort », en tournée :

  • Paris
    Théâtre des Blancs Manteaux : 15 rue des Blancs Manteaux, 75004 Paris (Métro Hôtel de Ville)
  • Toulouse
    Café théâtre Les Minimes
  • Montpellier
    Kawa Théâtre

 

 Casting
La mise en scène signée Olivier Maille fait la part belle à la répartie et à l’inattendu. Olivier est enfant du verbe mais sa carrière il l’a débutée avec un costume un peu spécial, celui d’avocat. A son actif depuis qu’il a troqué sa robe contre les planches « Quand j’étais amoureux », « Les Zexperts – Mais qui a tué le cadavre mort?»! , « J’y comprends rien! » , « Le régime se sarkophage », «Jusqu’ici tout val mal!», « Le videur du paradis ».

La Mort : Jérôme Rodrigues de Aguiar, Rui Silva ou Florent Chesné
Franck : Olivier Maille, Stéphane Szestak ou Benoît Ménager,
Caroline : Kim Schwarck, Elise Hobbé ou Mélodie Fontaine.

N.B : Ce billet est le premier du genre … Ecrit à 4 mains par Stef et Pierre … A bientôt pour d’autres billets de ce type, à 4, 6, 8, 10 mains, voire davantage encore !

 




La Porte des Enfers, Laurent Gaudé

La Porte des Enfers


La mort est sans doute le dernier refuge de la religion dans nos sociétés contemporaines.


La mainmise sur la cellule familiale s’estompe peu à peu, les positions d’une grande partie de l’Eglise sur la sexualité de la société semble anachronique.

La vie sur Terre n’est quasiment plus considérée comme un passage obligé avant d’atteindre un autre monde, on a vu ainsi se développer des sociétés entières basées sur le désir, la consommation, la jouissance quotidienne et polymorphe.


Mais la mort reste propriété de l’Eglise. Les cimetières ne sont-ils pas les derniers lieux à connotation religieuse qui subsistent dans nos sociétés, aux côtés des lieux de culte ?
Ils représentent d’ailleurs un culte à eux seuls : le culte des morts.


C’est à ce culte qu’est consacré le roman de Laurent Gaudé, La Porte des Enfers.


Au commencement est un enfant, Pippo de Nittis. Jeune Napolitain, du haut de ses 6 ans, il a toute la vie à découvrir. Et pourtant, c’est sa vie qui va brutalement le quitter, un matin de marché, dans les rues animées de Naples. Un matin de marché ordinaire. Un matin où il craint d’être en retard à l’école. Un matin. Naples.

Des règlements de compte. Des échanges de tirs. Une balle perdue. Un enfant. Pippo.


Cette vie qui s’achève prématurément laisse Matteo et Giuliana désemparés. Ensemble et pourtant si seuls. Aucune communication n’est plus possible entre eux. Le spectre de leur fils se dresse désormais comme une véritable barrière dans leur couple.

Chaque regard qu’ils échangent, chaque parole qu’ils souhaiteraient prononcer viennent se heurter à la vision de leur enfant mort. Seules deux choses pourraient les réunir à nouveau : que leur fils leur soit rendu, ou que leur vengeance soit consommée.

Décor posé. Le moment est venu de plonger dans l’aventure.


L’auteur joue avec les nerfs et les émotions de son lecteur. L’atmosphère étouffante, la chaleur, la puanteur, la saleté.
Dans la lignée de L’Etranger et de La Peste de Camus, du Soleil des Scorta et de La Mort du Roi Tsongor du même Laurent Gaudé, le lecteur est opprimé, il suffoque.
Il ne reprend son souffle qu’une fois le livre terminé, l’histoire achevée, les secrets enfouis dans un oubli volontaire.

Et pourtant, dès que l’occasion se présente de replonger dans les univers oppressants que dépeint Laurent Gaudé, je ne peux m’empêcher d’y aller à pieds joints ! Et toujours sans le moindre regret !


Laurent Gaudé, La Porte des Enfers, éditions Actes Sud
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