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[Critique – vu à Avignon IN 2016] Au Théâtre de la Cité Internationale : Quand la démocratie éclabousse

Photo : Christophe Raynaud de Lage
Photo : Christophe Raynaud de Lage

Sur une scène noire de laquelle n’émergent que des isoloirs blancs faisant office d’écran, une élue zélée entre et installe méticuleusement une urne en attendant l’arrivée du maire. À la capitale le bureau 14 est prêt, c’est jour de vote ! Alors que tout le monde prend place, les heures défilent et, toujours aucun électeur en vue, les isoloirs n’isolent personne : est-ce à cause de la tempête de pluie battante ? Les responsables du bureau aimeraient s’en convaincre, tous se mettent à appeler leurs proches à voter et deviennent fous à la vue du seul électeur venu, ce qui donne lieu à des scènes pleines d’humour au milieu du chaos. Lorsqu’enfin les électeurs se déplacent, le résultat est édifiant : le pays a enregistré un taux d’abstentionnisme record, 80% de votes blancs.

De là, tout s’accélère, les politiques sur-réagissent et la pièce s’emballe. Maëlle Poésy construit alors une comédie noire sur le monde politique et la démocratie. En effet, elle met tour à tour en scène un petit groupe de ministres reclus, tous stéréotypés et appelant à la comparaison avec notre propre paysage politique. Que se passerait-il si demain, un tel scénario avait lieu ? Dans la capitaless, un état d’inquiétude est proclamé, des cellules de crise, des collectifs d’infiltration pour la vérité sont créés et plutôt que de tenter d’écouter le peuple, on assiste aux revers du pouvoir et au recentrement des ministres sur leur petite personne. Pour eux, gouverner c’est mettre ses sujets hors d’état de vous nuire, qu’advient-il alors des libertés fondamentales de la démocratie une fois les « gens radicalisés » et devenus « nuisibles » ?

Finement orchestrée, la pièce met en lumière le fossé existant entre les politiques et le peuple et entre en écho direct avec le contexte actuel. Si l’on regrette quelques longueurs et que le spectacle aurait gagné à être plus ramassé pour ne pas souffrir de coupures de rythme, la scénographie est hypnotique, l’ambiance sonore et lumineuse est très réussie. Le chaos, signifié par la pluie qui envahit le plateau pour laisser place à une ambiance lourdement tropicale, laisse imaginer une capitale ravagée, irradiée par les actes fous des ministres. Prêts à sortir des lance-flammes pour réprimer un peuple inactif, ils se disent en état de siège bien que pour certains, les souvenirs du siège remontent à des cours de latin du collège.

Tournée en dérision avec lucidité, la soit disant franchise des politiques perd toute sa crédibilité dans ce spectacle, les mises en scène successives de discours télévisés achèvent de les rendre risibles. Bien assis, le public s’y retrouve d’autant plus invité à une remise en question qu’il est considéré comme ce peuple qui, rassemblé, détient le vrai pouvoir : la république est morte, vive la république !

Ceux qui errent ne se trompent pas, de Kevin Keiss en collaboration avec Maëlle Poésy, d’après « La Lucidité » de José Saramago. Mise en scène de Maëlle Poésy, avec Caroline Arrouas, Marc Lamigeon, Roxane Palazzotto, Noémie Develay-Ressiguier, Cédric Simon, Grégoire Tachnakian.

Du 5 au 18 décembre 2016 au Théâtre de la Cité Internationale (Paris) Plus d’informations ici : http://www.theatredelacite.com/




« Politiquement correct » : L’amour au front

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« En 2017, Marine Le Pen devant François Hollande au second tour, selon un sondage », cette phrase n’est pas issue du dernier spectacle écrit et mis en scène par Salomé Lelouch à la Pépinière, mais des derniers gros titres du journal l’Express. Se saisissant volontairement de l’actualité et de l’entrée en campagne de plusieurs candidats à la présidentielle de 2017 en France, l’auteure et metteure en scène a imaginé ce scénario somme toute inquiétant d’une extrême droite au second tour face à la gauche, non pas en débats, mais autour de Mado et Alexandre, amoureux en dépit de leurs partis pris politiques divergents.

Le soir de l’annonce des résultats du premier tour des élections présidentielles, une heure avant le moment fatidique, Mado et Alexandre se rencontrent par le plus grand des hasards dans un bar de la capitale dans lequel ils avaient tous deux bu un verre la veille, et où leurs téléphones portables y ont été maladroitement échangés par un serveur qui devait les recharger. Le lendemain, ayant seulement convenu de se rendre leur portable, ils décident de boire une bière, puis deux, et sans parler politique, ils terminent la soirée ensemble à l’hôtel. Si la rencontre avait tout pour être romantique et déboucher sur une histoire d’amour, leurs orientations politiques vont vite faire entrave à tout futur à deux. Alors qu’Alexandre, un catholique proche du Front National où il devrait bientôt prendre des responsabilités avait fouillé dans le portale de Mado, de gauche et professeur d’Histoire au Lycée Jules Ferry, il s’était bien gardé de lui parler de ses idéaux. Resserrée autour de ces deux personnages et de leurs meilleurs amis ainsi que le serveur – Cupidon fautif de l’histoire – l’action sert pourtant un discours très politique ancré dans des problématiques actuelles dépassant le couple d’amants. Du début jusqu’à la fin, le rythme va crescendo tandis qu’Alexandre s’enlise et fait tout pour dé-diaboliser son parti avant que Mado ne découvre son vrai visage. Vaste quiproquo ayant toujours lieu dans le même bar parisien, la pièce regorge de situations cocasses et délirantes, comme lorsque leurs meilleurs amis font tout pour enrailler leur relation. Piquants, plein d’humour, certains échanges sont attendus mais très bien portés par les acteurs, notamment par la meilleure amie marxiste, féministe et féminine de Mado, Andréa, jouée par Ludivine de Chastenet.

En quête d’un compromis pour s’aimer, la jeune femme et son amant, le Front National et la gauche sont pourtant irréconciliables, le politique l’emporte sur la belle rencontre. Si la mise en scène est fluide et les comédiens bien dirigés dans leurs rôles, le contenu du texte est assez ambigu et Salomé Lelouch prend des risques. À plus d’une reprise le Front National est défendu et longuement présenté comme un parti comme un autre. Alexandre est si convaincant dans sa tentative de séduction de Mado, jeune femme plutôt à l’ouest et peu encline au débat, que l’effet produit sur le spectateur est dérangeant tant il se trouve séduit par des propos qui œuvrent à la dédiabolisation d’un parti qui scandalise et bénéficie en ce moment de beaucoup d’attention médiatique. Car derrière le personnage d’Alexandre se cachent bien de vraies personnalités politiques dont les propos ne devraient peut-être pas aussi explicitement se voir être adoucis sur une scène de théâtre. Pour autant, le théâtre est  là pour faire sortir le spectateur de sa zone de confort, le bousculer et l’interpeler, mais la pièce bien que divertissante, ne se présente pas comme une leçon de politique et le texte n’est pas aussi saisissant qu’un texte comme celui de « Le Projet Poutine », de Hugues Leforestier, récemment mis en scène au théâtre des Béliers Parisiens.

« Politiquement correct », écrit et mis en scène par Salomé Lelouch, à partir du 2 septembre 2016 à La Pépinière Théâtre, 7 rue Louis le Grand, 75002 Paris. Durée : 1h15. Plus d’informations et réservations sur http://www.theatrelapepiniere.com/




Avignon OFF 2016 : « Kennedy », au nom du père, du fils, et des États-Unis !

Photo : Aude Vanlathem
Photo : Aude Vanlathem

Avec Kennedy, Ladislas Chollat, salué en 2014 pour sa mise en scène de Le Père de Florian Zeller qui avait remportée pas moins de trois Molières, propose une immersion dans les rouages familiaux et politiques – pléonasme dans leur cas – de la famille Kennedy.

Le public, habité par des images de l’assassinat à Dallas en 1963 de JKF, d’une Jackie Kennedy en tailleur Chanel et au sex-appeal de l’ex-président et de ses frères, découvre la puissante dynastie sous un nouveau jour. Avec des symboles efficaces comme le drapeau américain et des documents d’archives ou de films typiquement américains, le metteur en scène plante le décor d’une suite d’hôtel composée de deux panneaux servant souvent d’écrans, sans pour autant sombrer dans un effet Powerpoint qui avait caractérisé sa mise en scène d' »Encore une histoire d’amour », au Studio des Champs-Elysées cette saison. Du début à la fin du spectacle y sont en effet projetés des portraits de la famille Kennedy dont JFK et son frère Bobby, fiction et réalité se mélangent, parfois le président s’adresse à nous, mais l’effet House of Cards n’opère pas.

Les Kennedy, c’est d’abord un clan et beaucoup d’argent. On pense alors aux prochaines élections Clinton-Trump et à cette politique américaine oligarchique qui ne bouge pas, pour autant, les Kennedy restent un cas unique. Joseph Patrick Kennedy, le patriarche, rêvait déjà de briguer la Maison Blanche de sorte qu’il parvint à éduquer ses fils avec ce seul dessein, planifiant ainsi l’accession au pouvoir minutieusement programmée de sa descendance. Dès le départ, le spectacle s’inscrit dans ce rapport à la filiation et au « projet Kennedy ». Dépeint sous un angle inhabituel, JFK est présenté comme un homme malade, angoissé, fragile, cassé par les rêves de son père et paranoïaque – tout dans les attitudes du comédien traduit ces inquiétudes. Au duo des Kennedy vient enfin s’ajouter une femme, tantôt Jackie, tantôt Marilyn, elle est surtout aux yeux du président une potentielle espionne. Dans une atmosphère qui accentue la décadence, notamment sexuelle de JFK sans cesse sauvé par le clan, le pouvoir et la politique sont présentés sous un jour bien sombre. La fortune familiale, soupçonnée de s’être constituée sur fond mafieux y est remise en question et par extension, les bases du pouvoir à l’américaine. Si les acteurs sont convaincants, leur jeu manque toutefois de ce qui fait l’imaginaire social des Kennedy, à savoir un charisme à l’américaine et une allure séductrice.

Au demeurant, la qualité du texte et de la mise en scène réside dans le fait que les Kennedy sont, certes démystifiés, mais pour mieux servir le mythe. Comparés aux Atrides, à ces dynasties grecques et à ce qui fait une grande famille de pouvoir, quelque chose d’héroïque ressort de la mort annoncée du président. À la manière d’Achille, JFK a fait le choix de prendre le risque de mourir et d’entrer au panthéon des présidents adorés plutôt que d’avouer son infirmité et de rester sur ses gardes. Peut-être plus encore que le clan Kennedy, c’est un discours sur la politique américaine qui émerge de cette création, en écho avec les prochaines présidentielles, on ne peut s’empêcher de penser que ces élections n’ont rien de plus à proposer que du scandale et un pouvoir appuyé par l’argent déjà bien en place. Aux États-Unis, la présidence est une affaire de familles.

Kennedy, de Thierry Debroux, mise en scène de Ladislas Chollat, avec Alain Leempoel, Dominique Rongvaux et Anouchka Vingtier.

Festival d’Avignon, Théâtre du Chêne Noir, 8bis, rue Sainte-Catherine, 84000 Avignon, jusqu’au 30 juillet, relâches les lundis, 15h, durée 1h30.




« Momo », un grand boulevard !

Ce vendredi, lorsqu’André et Laurence sont allés faire les courses, ils n’avaient pas prévu qu’un débile leur piquerait leur caddie avant même qu’ils ne soient passés à la caisse. Cela quelques minutes avant la fermeture du magasin. Ils n’avaient pas non plus planifié de retrouver le même type, chez eux, après qu’il a livré les courses et pris une douche. Et pourtant, c’est bien là le point de départ de « Momo », la nouvelle pièce de Sébastien Thiéry.

Copyright : C. Nieszawer
Copyright : C. Nieszawer

Comme à son habitude, l’auteur ne respecte aucune convention, sauf celles dictées par son imagination, toujours très surprenante. Très vite, la situation devient ubuesque et les scènes successives sont autant de pierres qui bâtissent une comédie très drôle et explosive. Patrick (c’est le nom de l’étranger), affirme être le fils de Laurence et André, parti pour Montpellier il y a 20 ans, afin d’essayer d’oublier sa famille – comme on oublie une histoire d’amour douloureuse. Malheureusement, il semble que ses parents, eux, aient réussi à l’effacer de leur mémoire. Est-ce un dangereux cambrioleur ? Comme face à un fou dangereux, le couple décide de jouer le jeu pour ne pas le contrarier.

Puis, entre la mère supposée et le fils nouveau, les liens se reforment, la discussion se créée. Pourquoi est-il revenu ? On l’apprend de Sarah, la fiancée aveugle de Patrick qui se révèle ne pas être débile, mais malentendant. Il est de retour sur les lieux du traumatisme : s’il ne partait pas, il aurait tué sa famille. Les cœurs s’ouvrent, les larmes coulent, jusqu’à un dénouement à rebondissements sentimentaux réussis : il s’avère que Patrick s’est trompé d’immeuble, il a confondu Laurence et André avec un couple du même âge, portant le même nom à une lettre près et habitant à côté. Mais l’histoire ne s’arrête pas là…

Copyright : C. Nieszawer
Copyright : C. Nieszawer

Une certaine élégance se dégage de la scénographie d’Edouard Laug, très réaliste au premier abord – la scène d’exposition se déroule dans les rayons d’un supermarché – elle fait ensuite place à un grand appartement bourgeois dont les murs ne sont pas complètement opaques et laissent deviner ce qu’il se passe dans les chambres bordant le salon. La mise en scène de Ladislas Chollat utilise bien ce dispositif, aidé par la musique pour soutenir quelques effets cinématographiques. Le travail principal semble avoir été fait auprès des acteurs, tout en essayant de les faire s’émanciper avec finesse de la mise en scène de boulevard conventionnelle – on pense notamment à Muriel Robin qui tape avec vigueur sur le canapé du salon, accessoire symbolique du boulevard bourgeois.

Car oui, ici Thiéry ne signe pas un simple boulevard efficace – tel « Comme s’il en pleuvait » au théâtre Edouard VII – ce « Momo » est double ; les situations comiques d’un fond brûlant. Ce fils de 42 ans qui s’invite dans la vie d’un couple respectable qui n’a jamais réussi à en avoir relance les désirs maternels de Laurence qui, consciente de cela, le considère très vite comme la chair de sa chair, parlant la même langue que lui. Patrick, lui, semble tout le temps énervé comme sa mère. De vraies questions existentielles naissent sur la transmission : « nos souvenirs vont disparaître, si on ne les donne pas à quelqu’un », dira Laurence, dans une scène sombre.

Si les acteurs portent tous leurs rôles avec finesse, Muriel Robin s’illustre particulièrement brillante. Celle qui, telle Jacqueline Maillan, n’a qu’à paraître sur scène pour rendre le public hilare, ne cesse jamais d’avoir l’air sévère. Et pour cause : l’arrivée de ce fils providentiel lui apporte les réponses aux questions qu’elle n’osait plus se poser. Pragmatique et autoritaire, tenant avec force les rennes harnachant un mari craintif, elle se transforme en mère enamourée. Robin nous impressionne par la finesse de son jeu dans les instants dramatiques : aucune larme, aucun excès, une intériorité qui montre que derrière l’humoriste, une grande actrice existe.

Lors de la scène finale, malgré le quiproquo qui a conduit Patrick à prendre le couple pour ses parents, Laurence-Muriel Robin lui demande de rester. Elle plaide contre cette vie injuste qui lui a interdit d’avoir des enfants. Et Thiéry fait dire à une actrice très ouvertement lesbienne qu’ « une maman, ce n’est pas de l’orthographe, c’est dans le cœur que ça se lit » ; « Momo » devient alors pièce manifeste face au climat réactionnaire d’un pays encore divisé sur la question de l’accès à la parentalité pour les couples de même sexe.

Réunie, l’équipe de « Momo » produit un grand théâtre de boulevard, extrêmement drôle, mêlant ressorts classiques du rire burlesque et véritable message, en phase avec les préoccupations sociétales actuelles.

« Momo » de Sébastien Thiéry. Mise en scène de Ladislas Chollat, actuellement au Théâtre de Paris, 15 rue Blanche, 75009, Paris. Durée : 1h20. Plus d’informations et réservations sur theatredeparis.com




Comment sortir de cette Schitz ?

Comme la famille Schitz pourrait être n’importe quelle famille, la scénographie représente n’importe quel endroit : est-ce un appartement ? Un chantier ? Une salle de mariage ou de conférence ? Tout cela à la fois : c’est une place publique pour des émotions atroces distillées en dialogue, danse ou chanson façon cabaret glouton.

La famille, ce sont deux obèses qui ne savent pas quoi faire de la fille qu’ils ont créée à leur image. Ils la cèderont à celui qui voudra bien d’elle. Le texte d’Hanoch Levin décrit une situation plus que cynique, sombre et dérangeante. La fille est d’abord tâtée, pesée et comparée au cours de la viande de bœuf, bien plus coûteuse. Dépitée dans sa solitude, elle n’est pourtant pas dénuée de rêves, pas même triste de cette situation. Elle a confiance en la vie : un jour son prince viendra et l’enlèvera à ses parents qui, décidément, ne sont pas décidés à crever aussi vite qu’elle le souhaite.

Un jour, enfin, le premier venu arrive. Un maigre officier réserviste qui séduit la fille, en lui disant qu’il n’attend d’elle qu’une femme qui sache tricoter. Après ces deux minutes de séduction intense, le masque tombe : il ne l’a séduite que pour profiter de la fortune du père. Mais ce n’est pas grave : tout le monde s’en fiche, tant qu’elle se marie et qu’elle se fait ensemencer ; personne ne s’en offusquera.

Le mariage est négocié comme un tas de fripes, à la troisième personne, ouvertement, devant la fille. « Le gendre veut l’entreprise et l’argent du père ». La fille est d’accord, prête à tout pour fuir le foyer familial et pour le dupliquer dans un nouvel appartement trois pièces que son mari a négocié dans la dot. D’ailleurs, le futur époux dit « oui » le jour du mariage, seulement quand Papa a signé le chèque de 200 000 lires.

On n’a aucune empathie pour les personnages. La fille est toute aussi monstrueuse que son mari. On se délecte du passage de la séduction où elle roule des pelles à son homme, lui demandant entre chacune s’il peut reconnaître ce qu’elle a mangé la veille. De son propre aveu, c’est la possibilité de manger du saucisson qui tient le père en vie. Il se voit « marié à une imposture », puisque la femme qu’il a épousée n’est plus la même que lorsqu’ils avaient vingt ans. Pourquoi ces gens passeraient leur temps à s’empiffrer s’ils étaient heureux ? Au milieu de cette vie que l’on imagine sans cesse répétée, l’angoisse prend le pas sur le rire qui, jusque-là, rassurait le spectateur.

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Tout cela est effrayant. Levin est un virulent critique de la société Israélienne qu’il a vue grandir. Cette pièce « politique », écrite en 1975, n’a pas pris une ride quant à sa force de dénonciation d’une société fascinée par la consommation, notamment des produits d’Outre-Atlantique : « Je vais à Los Angeles, tout est merveilleux là-bas, ne serait-ce parce que tout est américain », dira la mère. Levin dénonce aussi le militarisme forcené de l’état. La jeune fille fait un enfant surtout dans le but qu’il parte à la guerre (une guerre qui, au cours de la pièce, éclatera deux fois à l’heure du repas). Le mari, après après avoir fait fortune en creusant des tranchées pouvant être utilisées comme tombe à la fin de la guerre, finit par mourir. Son beau père dont il attendait la mort ardemment hérite de ses affaires. Ironie du sort, cet événement plonge cette tragi-comédie au sommet de l’horreur : cette femme à la « vie peu reluisante » s’est fait prendre son homme par la patrie qu’il exploitait pour s’enrichir.

La mise en scène de David Strosberg et le jeu des acteurs, souvent face au public, semblent d’abord brouillons et imprécis dans l’utilisation de l’espace. Le texte est déclamé et non incarné. Mais que pourrions-nous attendre d’esthétique de la part de ces monstres qui ne se rendent même pas compte que leurs plus grandes victimes, ce sont eux-mêmes ? Bruno Vanden Broecke et Jean-Baptiste Szezot, respectivement père et beau-fils, font preuve d’une distanciation glaçante propre au jeu flamand. Ils nous disent quelle est la réalité brute et froide dénoncée par Hanoch Levin. Si d’abord les membres de cette famille prêtent à rire, avec ces corps devenus des fardeaux, on sombre vite dans le drame de vies ratées, utilisées pour un destin auquel la vie du peuple n’a que peu d’incidence : les guerres.

Schitz, dans son agonie qui ne vient jamais, semble nous dire : c’est donc ça la vie ?

« Schitz » d’Hanoch Levin. Mise en scène de David Strosberg, actuellement au Théâtre de la Bastille, 76 rue de la Roquette, 75011 Paris, 75014 Paris. Durée : 1h35. Plus d’informations et réservations sur www.theatre-bastille.com.




Devenez machiavélique en 10 leçons

Copyright : Pierre Grosbois
Copyright : Pierre Grosbois

Trois princes en devenir viennent pour un stage, animé par le coach Machiavel et son assistante, sur la thématique « comment conquérir le pouvoir, et comment le garder ». Sur scène, tout a l’apparence d’un séminaire d’entreprise : lumières en plafonnier, cloisons amovibles, café et matériel de jeu. Dans la salle, un peuple qui ne demande qu’à être gouverné : le public.

Une suite d’exercices pratiques permettra à chacun des participants de conquérir le pouvoir, et immanquablement de le perdre. Les attributs de ces princes-stagiaires sont aussi contemporains que grotesques : une couronne d’Epiphanie, un carrosse qui est une Peugeot 607 coupée en deux… Les armes sont des pistolets de Laser Game et chacun porte une cible qui permet au détenteur du pistolet de les éliminer (et de passer 5 minutes dans le couloir). A chaque échec, coach Nicolas souffle dans son sifflet en or pour « débriefer » sur la scénette qui vient de se dérouler.

Les participants, timides d’abord, prennent peu à peu goût au principe et laissent jaillir la part de noirceur qui les habite de façon de plus en plus naturelle et spontanée. Nous, public, nous laissons mener dans le tumulte comme une sorte de jeu dont on serait le héros et l’on encourage telle ou telle action de la part des personnages en fonction de l’empathie qu’il inspire. Les passions se déchaînent et donnent lieu à des passages délirants ; on pense notamment au moment où la princesse Myriam décide de « faire la teuf » et se retrouve à fesser Max sur le dancefloor au son endiablé d’un madrigal.

Le texte originel de Machiavel, on ose à peine le présenter. Daté de 500 ans, il aurait tout aussi bien pu être écrit hier. Empreint d’un fort cynisme (d’autres diraient réalisme), il égraine les bons conseils pour un accaparement du pouvoir réussi. C’est tellement fin que la recette semble encore être la bonne aujourd’hui. L’homme est sombre, et Machiavel ne s’embarrasse pas d’humanisme pour tenter de l’en excuser.

Laurent Gutmann a fait un grand travail d’adaptation, partant de la forme d’un traité, il réussi très bien à le transformer en conseils avisés de pédagogue moderne. Seul le personnage de Nicolas porte la bonne parole, parfois un peu aidé par Karine, son assistante. Les personnages, eux, dialoguent d’une façon qui semble être la plus spontanée qui soit. Oui, cette pièce mérite bien son sous-titre : « tous les hommes sont méchants » !

 « Le Prince » de Machiavel, adaptation et mise en scène de Laurent Gutmann, au Théâtre Paris-Villette jusqu’au 8 octobre, du mardi au samedi à 20h. Dimanche à 16h. Durée : 1h35. Plus d’informations sur www.theatre-paris-villette.fr.




Pouvoir, sexe et trahison à l’Hébertot

cartes du pouvoir

En mettant à l’affiche « Les Cartes du Pouvoir », le Théâtre Hébertot surfe sur l’engouement provoqué par la série « House of Cards ». La pièce est une adaptation de la pièce « Farragut North » de Beau Willimon. Pour elle, la production met le paquet : affiches dans Paris depuis le début de l’été et bande-annonce dans les cinémas de la capitale. Fort heureusement, toute cette stratégie médiatique sert un spectacle réussi.

Le public est invité à suivre la stratégie d’un candidat démocrate à la primaire de son parti depuis son cabinet de campagne. Un cabinet qui, de prime abord, paraît être un banc de requins squattant les hautes sphères du pouvoir, rassemblés pour dévorer le camp adverse : le directeur de campagne, l’attaché de presse, la stagiaire blogueuse, eux-mêmes entourés de journalistes prêts à tout avec lesquels la connivence est évidente. On assiste, au début, à un bal d’autosatisfaction puant où les ressorts de la victoire sont évoqués avec cynisme : le but n’est pas de convaincre les électeurs, mais de faire sombrer le candidat adverse. Pour cela, tous les moyens sont bons. Mais très vite, on comprend que l’on suit le mauvais camp, puisque les personnages principaux ont des idéaux et de la morale, et qu’ils croient aussi en la force de leurs propositions politiques.

Steven Bellamy : « Les gens n’entendent que le scandale »

Les échanges entre les personnages sont trépidants, jouant du champ lexical auquel nous, français profanes, sommes désormais habitués, « sénateur », « sondages dans les états clés », « gouverneur » et « whisky » : tous sont égrainés. On est pris dans le jeu comme dans un épisode de « House of Cards » ou « Scandal ». Les personnages principaux, bien qu’affichant des valeurs morales, ne manquent pas de cynisme, envers l’amour, ou le peuple qu’ils se targuent de vouloir servir. La dualité de propos rend les situations d’autant plus passionnante et ne manque pas de nous rappeler ces pièces anglo-saxonnes modernes qui traitent de problèmes actuels, comme « Race » de David Mamet.

« Les Cartes du Pouvoir » ne suit pas le rythme linéaire d’une campagne, se contentant de montrer comment un cabinet gère quelques crasses de la part de l’équipe adverse. C’est une vraie pièce, avec ses nombreux coups de théâtre. L’action se resserre rapidement autour du personnage de l’attaché de presse, Steven Bellamy (Raphaël Personnaz). Manipulateur manipulé, dont la chute est orchestrée par le camps opposé, on assiste finalement à sa descente aux enfers, le tout dans un laps de temps très bref (trois jours environ), belle démonstration de la vitesse à laquelle en politique américaine, les hommes se font et se défont.

Le drame est servi par une équipe d’acteurs justes. Dans le rôle de Paul Zara, Thierry Frémont est excellent, homme de conviction, politique idéaliste, il est aussi brut de décoffrage et très « américain » dans ses postures : parfois, on s’attend à entendre un accent texan jaillir de sa bouche. Aussi, Raphaël Personnaz se révèle comme un comédien de théâtre très convaincant, rongé par ses démons et la peur de n’être rien s’il est éloigné de l’adrénaline des campagnes. Notons aussi la très bonne performance de Roxane Duran, alias Molly, stagiaire espiègle, sensuelle et amatrice d’hommes murs.

L’action se déroule dans un décor moderne et froid, composé d’éléments amovibles glissant au gré des espaces comme des pièces sur un plateau d’échec : allégorie de la situation qui s’imbrique sous nos yeux. La mise en scène de Ladislas Chollat est pleine d’idée et utilise bien ce dispositif.

Concrètement, « Les Cartes du Pouvoir » ne parle pas de politique, mais des jeux qui l’entoure. Bien sur, cela questionne aussi nos rapport avec nos gouvernants, sur l’intérêt accru que chacun nourrit plus ou moins pour la forme au détriment du fond. On s’amuse aussi de voir comment aux USA, la moindre des « affaires » françaises ferait couler tout le pan de l’appareil en place, quand dans l’Hexagone elles passent chacune comme des faits divers.

« Les Cartes du Pouvoir » d’après « Farragut North » de Beau Willimon , actuellement au Théâtre Hébertot, 78 bis boulevard des Batignolles (17e arrondissement), du mardi au samedi à 21h. Samedi à 15h30 et dimanche à 18h. Durée : 1h55. Plus d’informations sur http://theatrehebertot.com/




Bonne nouvelle, Frédérick Sigrist refait l’actu !

Un soir d’hiver. Le Funambule Théâtre à Montmartre.
Et funambule, Frédérick Sigrist en est un.
Pas de filet de secours.
Une heure et demie de numéro d’équilibriste.
Droite, gauche, et même centre.
Tout le paysage politique y passe.
Et personne n’est épargné !

Humoriste.
Acteur.
Imitateur.
Sportif (si si!).
Mime.
Il nous dévoile toutes ses personnalités.
Et même un peu de son intimité.
Sa famille (réelle et politique).
Ses amis (très peu en politique).
Ses origines (méfiez-vous des évidences).

Des sketchs qui s’enchaînent.
Le rythme ne retombe pas.
Les zygomatiques s’affolent.
Et finalement perdent prise.
Trop c’est trop.
Impossible de résister.
Le fou rire est libéré.
Lâché dans la nature.
A peine le temps de reprendre son souffle.
Que déjà le rire revient.
Seule accalmie possible : le tomber de rideau.

Une heure et demie a passé.
Pas un instant le rire n’a cessé.
(Bon, ça c’est pour la rime.
En fait, quelques instants par ci par là.
Pour la bonne santé de son public.)

Déjà des moments cultes en tête.
Qu’on se prend à répéter à la sortie.
Et qu’on se surprend à répéter des jours après.
« On me dit que … »

On me dit que ce monsieur ira loin !

Pratique
Frédérick Sigrist refait l’actu
Théâtre : Funambule Montmartre
Tous les vendredis et samedis à 20h.
Tarifs : entre 11,50€ et 20,50€
Réservations : www.funambule-montmartre.com et par téléphone : 01.42.23.88.83

 

Frédérick Sigrist - Affiche du spectacle

 

 




Sans visage – Chronique de l’horreur peu ordinaire

Pekka Hiltunen - Sans visage - Couverture
Pekka Hiltunen – Sans visage – Couverture

Un thriller qui nous vient du froid et interroge sur notre société contemporaine. Par l’intermédiaire des yeux d’une étrangère émigrée à Londres (Lia Palaja), Pekka Hiltunen nous fait réfléchir sur les mutations en cours au sein de nos sociétés occidentales.

La montée en flèche de violences toujours plus sordides, la prise de conscience et l’engagement citoyen, la crise de confiance croissante envers les institutions et administrations, police en tête.

Deux événement déclencheurs de toute l’histoire.
Le premier : une découverte macabre à l’arrière d’un coffre de voiture. Des restes humains, oeuvre d’un passage acharné d’un rouleau compresseur de chantier, déposés aux yeux de tous en plein coeur de la City. Voilà pour l’origine du mal.
Le second : la rencontre entre deux Finlandaises en terre étrangère (Lia et Mari), qui dès les premiers instants, comprennent qu’elles ont une histoire à écrire et vivre ensemble. Voilà pour l’origine du bien.
Vision quelque peu manichéenne qui va toutefois se voir nuancée au fil du récit.

Ce thriller, premier d’une trilogie londonienne, est un manifeste non dissimulé pour un certain féminisme, en guerre active contre la prostitution et les violences faites aux femmes. Un combat fortement teinté d’engagement politique, pour prévenir notre société moderne des dérives que peut engendrer la tentation de se rallier aux extrêmes. Notamment au regard de l’immigration et des débats publics que l’on connaît actuellement dans de nombreux pays européens.

« Sans Visage » peut se lire comme une ode au multiculturalisme. Au coeur d’un Londres composé de populations de tous horizons (est-ce qu’il le restera ? Les débats en cours en Grande-Bretagne pourraient modifier la donne). Avec deux héroïnes finlandaises. Et des personnages venus d’Europe de l’Est. Quel destin pour ces émigrés, en quête d’un nouvel avenir ?

Des ingrédients assez basiques finalement dans la littérature, mais qui font mouche sous la plume du finlandais Pekka Hiltunen. Sans doute grâce aux personnalités fortes des différents personnages, Lia et Mari en tête, et au rythme haletant du récit. Malgré certaines invraisemblances ou « heureux hasards » dirons-nous, « Sans Visage » ne vous laissera de répit qu’une fois achevé. Impossible de s’y soustraire en cours de lecture … 

Extrait :
La panique se propagea dans la rue. Elle se répandit sur les visages des passants et dans leurs gestes inquiets.
Encore écrasée par la torpeur matinale, Lia fixa la scène à travers la vitre du bus. Tous les passants arboraient soudain la même expression, comme une grimace provoquée par une terrible nausée.
On était début avril. Lia se rendait à son travail. C’était une cérémonie de soumission quotidienne, une heure en offrande au flux de la circulation qui traversait cette ville trop grande et trop remplie. Pour Lia, vivre à Londres signifiait vivre collée à d’autres personnes, un abandon constant de son propre espace vital au profit des autres.
Ce matin-là, dans la rue Holborn, peu avant le terminus de la rue Stonecutter, elle vit quelque chose qu’elle n’avait jamais aperçu auparavant.
L’instant avant la catastrophe. C’est à ça que ça ressemble.
Une voiture était garée sur le trottoir et une foule se pressait tout autour. Là se trouvait la source de la peur, le point zéro d’où la panique se propageait.
La voiture était une grosse Volvo blanche, garée en travers du passage piétons, comme abandonnée là en urgence. On n’apercevait personne à l’intérieur du véhicule mais le coffre était grand ouvert. Les passants le montraient du doigt, et ils étaient de plus en plus nombreux à ralentir le pas et à s’arrêter.
Dès qu’une personne s’approchait suffisamment pour voir à l’intérieur du coffre, son expression changeait. La grimace.
Quel qu’ait été le contenu, il les pétrifiait tous, comme s’ils recevaient un coup en pleine figure. Beaucoup se dépêchaient de s’éloigner.
Pourtant, la foule continua à s’amasser sur les lieux.
Par la porte ouverte du bus, Lia entendit les exclamations des passants. C’étaient des phrases angoissées, hachées, elle n’arrivait pas à savoir ce qui s’était passé. Un homme appelait un numéro d’urgence avec son portable. Une dame âgée avait fermé les yeux et répétait : «Mon Dieu. Mon Dieu.»
Lia se mit debout pour voir ce qui se passait sur le trottoir, mais à l’instant même le bus démarra et les portes se fermèrent. Le chauffeur appuya sur l’accélérateur pour se réinsérer dans la circulation. L’instant d’après, Lia fut projetée contre le siège devant elle, puis rebondit sur son propre siège. Le chauffeur avait pilé pour ne pas entrer en collision avec deux véhicules qui étaient venus se garer devant lui.
Le premier était une voiture de police. Ce n’est qu’en voyant le gyrophare clignoter sur le toit, même une fois la voiture arrêtée, que Lia fit le lien avec la sirène assourdissante qu’elle entendait en fond sonore. Le second véhicule qui s’était frayé un passage était une camionnette d’une chaîne télé, flanquée du logo d’ITV News.
Le bus repartit. Lia ne pouvait plus apercevoir l’intérieur de la Volvo d’aussi loin. En un instant, la scène étrange fut derrière elle.

 

Pratique :
Sans Visage – Pekka Hiltunen
Titre original : Vilpittömästi sinun
Traduction française : Taina Tervonen
448 pages
Editeur : BALLAND (5 avril 2013)
Langue : Français
ISBN : 978-2353151671

 




Vendredi – Quel est le rapport entre un toutou bien dressé et un journaliste militant ?

Les toutous et les journalistes peuvent au sens de Paul Nizan être des « chiens de garde » (1).

Si le premier a le mérite de défendre votre humble demeure, le second peut défendre la république et la liberté de penser, d’écrire et de faire savoir.

Or, en ces temps de campagne électorale n’est-il pas nécessaire de se replonger dans ces notions d’indépendance, objectivité et pluralisme!?

 Serge Halimi a écrit Les nouveaux chiens de garde en 1997 aux Editions Liber – Raisons d’Agir après la crise de 95. Le livre fait écho au pamphlet de Nizan Les chiens de garde.  Le propos était évidemment actualisé puisqu’en lieu et place des philosophes gardiens de l’ordre établi on retrouvait ici les journalistes, éditorialistes… Une réflexion bien étayée sur la force des médias en tant que « contre-pouvoir ».

Le postulat partisan étant le suivant « Au sein d’un périmètre idéologique minuscule se multiplient les informations prémâchées, les intervenants permanents, les notoriétés indues, les affrontements factices et les renvois d’ascenseur. » L’ambiance est donc posée, le texte est vindicatif et certains passages sont écrits au vitriol. On y apprend par exemple que Christine Ockrent (cible privilégiée de ce « jeux de massacre ») fait des « ménages » c’est à dire des interventions payantes, rémunérées par des entreprises du CAC40 pour y évoquer des sujets de société. Ce qui implique une parfaite partialité lors du vote des lois et ce n’est que le début de la longue liste des connivences et népotismes entre politiques et journalistes.

A défaut d’être modéré et de taper aussi sur les politiques « du moment », ça fait réfléchir!

L’ouvrage date de 1997 : pourquoi diable en parler aujourd’hui ?
Et bien parce qu’Halimi s’est adjoint les services de Pierre Rimbert, Renaud Lambert, Gilles Balbastre, Yannick Kergoat pour scénariser un film basé sur son livre. Le film « Les nouveaux chiens de garde » est sorti le 11 Janvier 2012 et est diffusé dans des salles d’art et d’essai (2). Il est rythmé par une alternance d’analyses et d’archives, à la manière d' »Inside Job »(3).
Serge Halimi décrit son film ainsi : « on a fait le choix d’un film de combat, qui ne prétend pas chercher la nuance en toute chose. »

(1) Paul Nizan essai/pamphlet : Les chiens de garde 1932.

(2) Projections

(3) Inside Job, film de Charles H. Ferguson (2010), oscar du meilleur documentaire en 2011.