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Gran Kino – 1989 – Rencontre

1989, premier album de Gran Kino est pour le moins original. Le principe : réunir des artistes aux horizons des plus divers (un douanier hongrois, un MC d’Atlanta, Calexico, Clare – de Clare and the Reasons) autour d’une année, 1989, et de leurs souvenirs.

Rencontre avec Robin Genetier (guitare, basse, clavier) : 

Arkult (A) : 1989. Des souvenirs dans toutes les mémoires. Et vous, quel souvenir marquant de cette année 1989 ?

Gran Kino (GK) : Le souvenir que j’ai le plus en tête pour cette année est celui de l’exécution de Ceausescu le 26 décembre. Je me souviens du contexte, des personnes avec qui j’étais et de l’ambiance de cette fin de décennie… Les images de ces deux corps gisants, avec une image brouillée, une sorte de pression entourant tout cela, ma famille devant cette télé qui rend cette situation presque comme une fiction… Un drôle de moment pour finir une année si forte.

A : Quel tournant pour la culture européenne et mondiale a signifié pour vous cette année bien particulière ?

GK : Le Mur de Berlin est certainement le plus grand tournant pour la culture européenne & mondiale … On découvre alors les pays de l’Est, on va voyager, apprécier la « nostalgique architecture soviétique »… D’un seul coup – ou presque – c’est comme si on cassait un barrage entre deux eaux stagnantes : l’Ouest découvre les musiques de l’Est, les volontés artistiques qui se sont battues et développées sous la dictature communiste … Tandis qu’à l’Est, les populations vont être confrontées au mur de la pop culture, qui en cette fin des années 80 est surpuissante.

A : 1989. Berlin. La Chute du Mur. Quelle est votre vision de la « berlinisation » actuelle de la scène culturelle française et européenne, plus de 20 ans après ?

GK : Nous avons eu la chance d’aller de nombreuses fois à Berlin pour jouer, visiter, observer, écouter et acheter des disques … Il paraît que cette ville est la ville la plus appréciée des artistes américains & européens, c’est surement dû à l’Histoire qui survole toujours les quartiers de cette cité, à la gentillesse de sa population, au sentiment de liberté qui règne dans ces rues immenses où au final peu de gens vivent. On sait ce qu’on en ramène, mais l’applique-t-on vraiment ailleurs ? On aime l’électro berlinoise, l’énergie de ses soirées, l’implication artistique des ces habitants mais je ne suis pas sûr qu’on puisse un jour répéter cela chez nous, comme nous avons su le faire avec la culture américaine, et c’est pas plus mal. C’est beau des endroits qui gardent leurs spécificités, leur propre « odeur ».

A : Quels pourrait être la prochaine année / les prochains déclencheurs susceptibles d’inspirer de telles réactions / initiatives ?

GK : Un jour, un journaliste m’a dit : alors vous allez faire 1990 ? 1991 ? … Même si dans chaque pays, il y a toujours un évènement marquant, je ne suis pas sûr que toutes les années aient une « importance » sur l’entièreté du globe comme ça peut être le cas avec 1989.

Bien évidemment 1968, ça serait aussi intéressant de travailler sur 2011 – avec les révolutions dans les pays du Maghreb – ou même plus précisément sur la crise de 1929 en faisant un pont avec maintenant … Il y a des thèmes à collaboration tout autour de nous, il suffit de trouver l’angle de réflexion, et d’étudier correctement le sujet. C’est en même temps plus simple et plus dur que de faire un album plus « conventionnel » : plus simple car l’histoire est là, et il suffit de creuser pour en avoir d’autres et alors d’avancer sur l’imaginaire entourant chaque événement mais aussi plus compliqué car chacun d’entre nous vit ces moments, les connaît, les appréhende, et il faut donc ni se tromper, ni trop extrapoler, ni soustraire la vérité à l’Histoire.

A : Quels sont vos projets pour le futur ?

GK : En plus du projet 1989, qui nous prend encore du temps à travers la tournée en France & à l’étranger, mais aussi des nouvelles compositions qui restent à venir dans le spectacle, nous avons plusieurs idées/projets en cours d’écriture et de réalisation.

Le principal projet nous vient d’Afrique du Sud, où après avoir tourné là-bas pendant 1 semaine en septembre dernier, nous nous sommes vu proposer une collaboration avec divers artistes sur 2 projets distincts. Tout d’abord à Durban, avec des rappeurs zoulous qui seront en France en juin prochain, et avec qui nous allons faire des titres et partir en tournée. Ensuite au Cap, on s’est vu offrir la possibilité de travailler avec des artistes chanteurs / musiciens / danseurs locaux sur l’importance de Nelson Mandela pour l’Afrique du Sud, son arrivée au pouvoir en 1994 et aussi les couleurs du drapeaux … Un énorme projet avec des A/R entre les deux pays, un documentaire, un album, une tournée à l’automne 2013 et peut être même les 20 ans de la présidence de Madiba en 2014 à Pretoria.

Il y’a d’autres projets plus « officieux » et qui nécessitent qu’on avance encore discrètement. Je pense que tout sera toujours orienté vers des collaborations avec des artistes étrangers ou de styles différents du nôtre, ou vers des recherches musicales nouvelles.

A :  Un petit mot pour les lecteurs d’Arkult ?

GK : Je recherche des musiciens / chanteurs suisse allemand pour un projet futur, et si vous en connaissez hésitez pas à m’orienter ! Ecrivez à awordtogk[at]gmail[dot]com … Sinon, merci d’avoir pris le temps de lire, de découvrir Gran Kino et son projet 1989. J’espère qu’il retiendra votre attention, et que vous comprendrez que ce projet est une histoire et que cet album n’est pas une compilation mais une suite d’histoires comme un recueil de nouvelles.

 

Gran Kino
Sara de Sousa : chant, piano, orgue, xylophone
Charlie Doublet : chant, saxophones, clavier
Morgan Arnault : batterie, choeurs
Robin Genetier : guitare, basse, clavier

Site Web : http://www.grankino.com
Site Bandcamp : http://www.1989.bandcamp.com
1989 sur iTunes : https://itunes.apple.com/fr/album/1989/id564788149

 




May Day May Day

« Il est libre Max, y en a même qui disent qu’ils l’ont vu voler », oubliez immédiatement la pub vantant les patchs nicotinés pour fumeurs invétérés.
Amis rêveurs et penseurs voici un son, que dis-je, une invitation qui vous séduira.
Somewhere to be found, le premier album de May Day s’adresse au petit prince qui roupille au fond de votre esprit d’urbain-hyperactif.
Mélancoliques ou pêchues, les chansons du duo sentent les grands espaces de l’Ouest Américain ou les plaines de l’Aubrac.
Natures, Maud Naïmi et Julien Joubert nous offrent de bien belles pistes, propres à l’envol.
Leur liberté discrète tatouée dès leur premier EP (Meet my love) semble désormais imprimée sur un large tissu aux motifs fleuris et liberty.

Après quelques notes on les imagine bien tous deux sur une petite scène mal éclairée d’un bar californien crasseux des années 50.
Surannée et presque désuète leur musique est romantique et poétique.
Conçu comme un voyage, fait de nouveaux départs « Start Again I » et « II » pour mieux rentrer à la maison « Home ». C’est la playlist d’un automne lumineux et rêveur.

Le clip délirant de Home dans lequel des septuagénaires (n’en disons pas plus, il ne faut vexer personne) participent à un houleux triathlon de bilboquet, lutte romaine, jeux de dés bien arrosés…

Sans vouloir passer l’album au peigne fin, gros coup de cœur pour « Closer », moitié pop, moitié rock et suffisamment original pour avoir l’anatomie d’un tube.
Punchy « Gone » qui illustre parfaitement ce choix du duo d’opter pour des protagonistes attachants et un brin paumés.
Etrange « White Knight » qui évoque la B.O de Titanic par le langoureux appel hypnotique de Maud dont la voix est « sirènesque ».
Triste berceuse que « Lullaby » qui semble entrer en résonance avec une détresse assumée et onirique.
On peut rester assez hermétique à l’association cuivres-voix de « Out of my mind » ou la dureté de « Temper », trop rugueux.
Mais quand Bettina Kee A.K.A Ornette se (re)met au piano dans « Broken Glass », alors là ça y est, on sort les grands mouchoirs.

Le 8 Octobre 2012, vous pourrez vous faire votre propre idée, puisque l’album sera dans les bacs.

 

En savoir plus sur May Day :

Le site pour tout savoir.

Le site pour tout écouter.

Le site pour tout acheter.




Hawaï Burger – Bon appétit

Kamehameha vous évoque,

1/ Le cri sauvage des supers guerriers de Dragon Ball Z,

2/ L’hymne de la coupe du monde de football Waka-Waka interprété par Shakira,

3/ Un médicament générique aux obscurs propriétés,

4/ Le souverain d’une île paradisiaque du pacifique.

 

Il fallait bien sûr penser à sa majesté Kamehameha Ier roi d’Hawaï au début du XIXeme siècle.

Hawaï doit son nom à son souverain mais l’histoire de l’île reste indéniablement liée à la gastronomie (île Sandwich). Le groupe français Hawaï Burger demeure donc dans la thématique.

Car, si certains dansent le Mia, d’autre dansent le hula. Aloha! Bienvenue à Hawaï, couronnes de fleurs et surfeurs.

Aux premières notes de « Spring Break », EP d’un jeune groupe parisien, on a du sable blanc entre les orteils. Déserté le morne béton. Oubliée la maussaderie. It’s fresh, so fresh.

Leur nom : Hawaï Burger

Charlotte et Paul. Puis Charlotte, Paul et Kevin. Et enfin, Charlotte, Paul, Kevin et Yann constituent ce groupe.

Ils ont pris le caractère volcanique de l’île et le saignant de la viande du hamburger pour créer quelque chose de frais, spontané et de novateur.

Charlotte au chant et aux claviers (synthé, mélodica, glockenspiel etc..) est la carte pop du groupe avec une formation classique (au violoncelle),

Paul au chant et à la guitare est la carte électro,

Kevin est à la deuxième guitare, c’est la carte rock progressif,

Yann à la basse, dernier arrivé du groupe, est quant à lui l’ultime carte très rock.

Est-ce l’air du grand large et ses alizés bienfaiteurs que leur rock transporte ?
En tous cas, ce carré d’as pop folk a de quoi nourrir l’espoir que cette collaboration produise du beau et bon son.

Voici de quoi exciter l’appétit des amateurs de nouveaux talents. Les Inrocks, au travers de leur « Lab » ont mis le grappin sur ces djeunes plein d’avenir.

Si vous n’avez rien contre le sucré-salé, un groupe au nom du célèbre sandwich américain à base d’ananas, à déguster sans modération ?!

Voici quelques notes de « Spring break ».

Voici le clip de « New Skin » réalisé par Swoon Productions.

 

Pour en savoir plus sur Hawaï Burger :

Le Facebook du groupe  : http://www.facebook.com/HawaiBurger?ref=hl

Leur page Soundcloud: http://soundcloud.com/hawaiburger

L’adresse mail: burgerhawai@gmail.com



Lundi – Yasmine Hamdan

J’ai rendez-vous avec vous.
Rien à voir avec le chanteur moustachu.
Non. Vraiment.

J’ai rendez-vous avec vous.
C’est un peu ce que l’on comprend de la rencontre de Yasmine Hamdan avec son public.
Rendez-vous était donné au Tigre, à deux pas du Louvre, pour un showcase très intimiste.
Le lieu s’y prête adorablement. Ambiance rouge, tamisée, qui rappelle le passé baroque de cet ancien cabaret.

Les portes s’ouvrent, le temps d’une conversation, puis le silence se fait.
La magie opère.
Accompagnée par une guitare basse, une batterie, un clavier puis un peu plus tard des tambours, Yasmine Hamdan se livre.

Les premières mélodies sont lancinantes, sensuelles, transcendantes.
Puis, inattendus, arrivent des airs de pop. On se croirait transporté au Pays du Soleil Levant. Agréable surprise. Rafraîchissante. Libératoire.

Yasmine noue ses cheveux.
Signe d’un nouveau moment dans le concert.
La bulle se referme sur le public. Les rythmes se font plus rapides. Les tambours résonnent. L’exaltation prend de nouvelles proportions.
Le regard perpétuellement porté quelques centimètres au dessus de son public, c’est un véritable cadeau que la chanteuse libanaise offre au public présent.

Hélas, tout a une fin. La dernière chanson se termine.
Les mélodies commerciales se font entendre dans la salle, éclatant la bulle mielleuse qui s’était formée, et redonnant sa place à l’anonymat et à l’impersonnalité.

Yasmine Hamdan
Nouvel album « Yasmine Hamdan », sortie le 23 avril (Kwaidan Records)
Facebook : https://www.facebook.com/pages/Yasmine-Hamdan/132375760195527
Site Internet : www.yasminehamdan.fr

P.S : Un grand merci à SeeSide pour cette soirée !

Prochain rendez-vous sur Arkult pour la sortie de son nouvel album le 23 avril.
D’ici là un teaser …




Mardi – Loheem

L’OM au Camp des Loges ?

Ah non pardon Loheem à la Loge ! (Paris 11, Métro Charonne)

Un concert comme on en redemande.
Milamarina pour débuter. La harpe électrique à l’honneur. Du beat. De la douceur.
Le public est séduit. Le public est surpris.
Mission réussie.

Puis Loheem entre en scène. Julie au chant, Antoine à la guitare.
Les chansons s’enchaînent et nous enchantent.
Les mélodies se mêlent. Les accords nous prennent au corps.

Et la voix nous laisse pantois.
Une voix pure, sans barrière, sans obstacle.

Un savoureux mélange d’anglais et de français.
Juste ce qu’il faut de chacune des deux langues pour nous dépayser, mais pas trop.
Pour nous perdre, et nous reprendre.
Acoustique, électrique. Tous les plaisirs sont là.

Et cerise sur la gâteau.
Sublimation, Nirvana.
Hommage à Kurt, ça ne s’invente pas ! Stay away !

Et on entraperçoit de nouveaux possibles.
La guitare rock. La voix qui porte.

Mais les lumières s’allument déjà.

Loheem
Facebook : https://www.facebook.com/loheem
Site Web : http://www.loheem.com/
Myspace : http://www.myspace.com/loheem
Noomiz : http://www.noomiz.com/loheem




Lundi – Kakkmaddafakka

Derrière ce nom bien étrange (qui n’est rien d’autre que la retranscription de Cock Mother Fucker … amis de la poésie bonjour), se cache un talentueux groupe norvégien !

Et dès les premières mesures, la fraîcheur de leur contrée d’origine nous entoure, nous envoûte, nous fait voyager, et nous emmène loin, très loin …

Des petits airs de pop, de rock, de jazz, … et même de rap !

En 2011, la bande conduite par les frères Vindenes sort son deuxième album « Hest ».

Petit aperçu …

Kakkmaddafakka

  • Axel Vindenes – guitare et chant
  • Stian Sævig – basse et chant
  • Pål Vindenes – violoncelle et chant
  • Jonas Nielsen – piano et chant
  • Kristoffer Van Der Pas – batterie

Musiciens associés

  • Martin Sande – chœurs
  • Sverre Sande – chœurs
  • Lars Helmik Raaheim-Olsen – chœurs

Sur Facebook : http://www.facebook.com/kakkmaddafakkamusic

Sur Twitter : http://www.twitter.com/kakkmaddafakka

Et sur le Net : http://www.kakkmaddafakka.com

 




Lundi – Lady Linn …


Lady Linn & Her Magnificent Seven. No Goodbye at all.

Un quelque chose d’Amy Winehouse à la première écoute …
Puis très vite, un style vraiment propre.
Quelque chose de rétro dans la voix, dans les accords, dans les mélodies.

Les « Magnificient Seven » ne sont pas innocents dans l’histoire.
A coups de contrebasse, trombone, saxo, trompette et j’en passe, ils créent le cadre idéal pour que vienne se poser la voix toute en nuances de Lady Linn.

On se laisse transporter tout doucement dans un décor des 60’s …
Le retour à la réalité une fois passés ces 12 titres n’est pas évident … alors on replonge, et l’on se dit qu’ils ont raison après tout … « No Goodbye at All » était prédestiné … on ne veut pas se séparer de cet album ! 

Sortie dans les bacs le 19 Mars 2012

Page Facebook : http://www.facebook.com/LadyLinnAndHerMagnificentSeven

 

 




Alex Beaupain : « Je suis très à gauche dans la vie mais très réac quand on parle projet artistique »




Ce n’est un secret pour personne: j’adore Alex Beaupain. Le 11 avril, date de sortie de l’album, connectée à Itunes Store, à minuit pétante, la touche F5 de mon clavier a manqué périr. L’entretien qui suit est donc celle d’une « geek », comme dirait l’artiste. Militants et militantes de la « bande à Beaupain » – ou juste mélomanes curieux, cette interview est pour vous.
Extraits.


Comme dans ton dernier album Pourquoi battait mon cœur, commençons in medias res. C’est voulu, cette narration qui se lance « au milieu des choses », alors que l’album retrace une histoire d’amour assez linéaire, avec ses différentes stations ?


Oui, la première chanson commence par « Et puis les plantes mortes ». L’idée dans cette chanson, c’est qu’après tout, on s’en fout de tout ça. Elle commence l’album comme on commencerait une histoire d’amour, dans un certain optimisme, un petit peu candide. En fait, elle annonce dès le départ que tout va très mal se dérouler après. L’idée était de partir sur quelque chose de très frontal, de très primaire. Avec une musique en majeur, plutôt joyeuse.


Il y a plusieurs co-signatures sur l’album: Jean-Philippe Verdin, Daniel Roux, Valentine Dutheil. Les textes sont-ils pour toi plus importants que la musique? Est-ce que tu y as plus de facilité?


En tout cas, j’aurais plus de mal à déléguer sur les textes. A lâcher là-dessus. Peut-être parce que, et tu as raison, je suis peut-être plus auteur que musicien. J’ai en tout cas plus de facilité à écrire des textes qu’à composer de la musique. Il y a quatre musiques qui ne sont pas de moi dans cet album. Ces gens, qui sont aussi mes amis, composent. J’écoute et quand je trouve ça bien, je pique. (Rires)


Et est-ce que tu pourrais t’imaginer poser ta voix sur un texte qui n’est pas de toi?


Difficilement. Parce que je ne me vis pas comme interprète. J’ai un intérêt comme chanteur quand je chante ce que j’écris.


C’est déjà arrivé qu’on te présente des textes?


Oui, oui. Ca va paraître prétentieux mais j’ai systématiquement trouvé ça moins intéressant que ce que je pourrais produire pour moi. Christophe Honoré a essayé au début. A mes débuts, il écrivait les textes, et moi, les musiques. Mais je trouvais ça moins bien.


Pourtant dans ton précédent album, 33 Tours, il y a une chanson, « Je veux »…


Oui, il l’a co-écrite. C’est un texte que j’ai corrigé. Christophe Honoré a plein de qualités. Je le dis tout le temps. Ca ne va pas le vexer. Il met en scène au théâtre, au cinéma, il écrit des scénarios, des livres. Mais les chansons… c’est quelque chose qu’il ne sait pas faire. C’est d’ailleurs une blague entre nous. Il est persuadé que les chansons qu’il m’a écrites sont des chefs d’œuvres encore jamais dévoilés. Et je suis persuadé que c’est mieux quand j’écris mes textes.


Et justement, sur « Je veux », c’était une volonté, cette touche à la Jacno ?


Oui, c’est un peu un pastiche, musicalement. Sur le texte, aussi. Ce texte a l’air comme ça très léger, mais raconte des choses très graves. C’est l’idée de vouloir plein de choses superficielles pour éviter d’avoir des choses profondes comme l’amour. Ce qu’on peut d’ailleurs retrouver dans une chanson comme « Amoureux solitaires ».


C’est curieux mais j’ai le sentiment que « Je veux » est un peu la grande soeur de certaines chansons du nouvel album. Notamment, dans cette dualité légèreté/gravité, lyrisme musical/cruauté des mots.


En commençant ce troisième album, j’avais deux volontés: aller vers quelque chose de plus pop et de plus rythmé. J’écoutais beaucoup Daho, Jacno donc forcément, c’est un univers qui me plaît. Dans 33 Tours, « Je veux » est presque une chanson à part. Une préfiguration de cette idée-là. Mais oui, très bien observé.
L’autre idée, c’était de s’ouvrir thématiquement un peu plus, et d’avoir des textes, je déteste le terme, sociétaux, voire politiques.


« La nuit promet » a été cosignée par Daniel Roux. Le Daniel Roux ? Quelle en est la génèse?


Oui, c’est Daniel Roux qui a écrit la musique. Il est décédé, il y a un peu plus d’un an. Il était bassiste. Il a longtemps travaillé avec Jean-Louis Aubert, avec Cali. C’était un ami, l’une des premières personnes avec qui je suis monté sur scène. Il y a très longtemps, Daniel m’avait donné plusieurs mélodies. J’aimais beaucoup ce qu’il écrivait. Et c’est sur l’un de ces playbacks que j’ai écrit « La nuit promet ». C’est une vieille chanson, en fait, que j’avais déjà essayé de mettre dans 33 Tours mais ça ne marchait pas. Ca part de mon amitié pour ce que faisait Daniel.


Et deuxième chose que personne n’a jamais remarqué dans cette chanson et qui me désespère absolument : « La nuit promet » est aussi un exercice formel. Un jeu sur les mots en –ar et en –ou. Mais si personne ne le voit, tant mieux. C’est aussi bien si on ne voit pas les ficelles.


On creuse encore. Dans le tout premier film de Christophe Honoré, 17 fois Cécile Cassard, il y a cette chanson, signée de toi et Lily Margot. Est ce que c’était un début de groupe? Tu pourrais t’imaginer jouer dans un groupe?


Pas du tout. Très simplement, on a composé, cosigné à trois la musique du premier film de Christophe. Il se trouve que pour des raisons contractuelles, c’est moi qui apparais au générique. J’avais tenu que dans le disque apparaisse aussi Lily Margot. Mais dans mon projet de chanteur, je détesterais être dans un groupe.
La démocratie, dans un projet artistique, ça ne marche pas. J’ai besoin d’avoir les rênes. Ca ne veut pas dire que je ne laisse pas de liberté au réalisateur ou aux musiciens mais à un moment donné, il faut que quelqu’un valide et en l’occurrence, sur mon album, c’est moi.


Mais est ce que ce n’est pas un poil contradictoire? Quand tu composes pour le cinéma, tu te mets au service du réalisateur, tu as des concessions à faire.


Quand je compose pour un film, c’est pareil. Je ne suis pas dans un groupe. J’obéis à quelqu’un qui est le chef, le réalisateur. Quand je fais un film avec Christophe, je me mets à son service. Je suis totalement dévoué. Peut-être un peu trop, parfois.
C’est atroce mais je crois beaucoup en la hiérarchie. Je suis très à gauche dans la vie mais très réac’ quand on parle projet artistique.


Peut-on parler d’une famille musicale Beaupain? Dans les crédits, il y a plusieurs noms qui reviennent. Des gens avec qui tu bosses depuis plusieurs albums : Rémy Galichet, Valentine Dutheil, Fabrice Petithuguenin, Fanny Lochu,…


Oui. Fanny Lochu, je la crédite parce qu’elle connaissait très bien Daniel Roux mais elle n’a pas travaillé sur l’album. Par contre, elle avait joué dans mon premier album. Valentine Duteil est ma violoncelliste de scène, qui m’accompagne depuis très longtemps. Rémy Galichet, je crois que c’est la première fois que je travaille avec lui. Par contre, je l’avais contacté à une époque pour l’inviter à travailler avec moi sur la musique de Dans Paris. Il y avait déjà une affinité dans le fait que je le connaissais déjà. Et tu as cité quelqu’un de très important, Fabrice Petithuguenin qui a fait absolument toutes les pochettes depuis le début. Et aussi la maquette de Serge, dirigé par Didier Varrod, que je connais depuis longtemps…


Qui fait aussi partie de…


Oui, qui fait partie d’une espèce de bande. Il a aussi beaucoup participé. C’est agréable, en fait. J’ai constitué avec mes amis, pas une Factory, mais il y a un peu de ça. Il y aussi Kéthévane Davrichewy, auteur. Diastème avec qui j’écris une opérette. Il y a mes musiciens. Ca finit par créer une bande.


Ce qui est drôle, c’est que tu travailles aussi avec les « bandes » des autres. La bande à Biolay : Nicolas Fiszman, Denis Benarrosh, Elsa Benabdallah,…


Oui, bien joué! Biolay, c’est un peu la figure de proue. Florent Marchet, Arman Méliès, Joseph d’Anvers, tous ces gens là. Je me sens plus proche de ce courant que de ce qu’on a appelé, il y dix ans, la nouvelle scène. Donc ce n’est pas étonnant si on travaille avec les mêmes personnes. C’est comme si on était plus dans une famille que dans une autre.


Alex Beaupain donnera ce soir un concert à la Cigale. Pour les retardataires, une autre date a été ouverte : le 4 novembre au Bataclan. Les dates de sa tournée arrivent !
Pour les cinéphiles, dans les salles, le 24 août, Les Bien-Aimés de Christophe Honoré.
Et merci à Thomas D., l’homme aux lunettes noires 😉


Pourquoi battait mon cœur. Alex Beaupain. Naïve. Sortie le 11 avril.


Crédits photos: Antoine Le Grand