La tête en friche loin des têtes d’affiches

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Au départ, un livre aux ingrédients pourtant pas bien « folichons »: vieille mamie attachante et benêt au cœur tendre, le tout agrémenté de gras pigeons armés de sobriquets, de livres et dico en passe d’être apprivoisés. Pourtant, La tête en Friche de Marie-Sabine Roger est un de ces bouquins qui réussit à donner naissance à un plat doux et relevé.

Miraculeusement le mélange prend vie, senteur, goût, odeur et sens. Parce que les phrases sont brutes, osent le nu. Le lecteur assiste à un étrange accouplement où les mots de tous les jours n’ont pas peur de se dresser fièrement à côté de mots nouveaux, un rien prétentieux parfois, mais pourtant si délicats…Tout ça  sous la plume aguerrie de Marine-Sabine Roger, qui, ancienne enseignante, connaît bien son sujet.

Le sujet justement : une rencontre entre Germain, un « gars de la terre » en manque d’amour et Margueritte une vieille dame passionnée de livres et avide de transmission. Mais aussi le langage des mots, la confrontation d’un Savoir que l’on croit inaccessible et d’une naïveté parfois mangée par ce premier. Bien des fois, je me suis sentie Germain, bien des fois, je me sens encore Germain, perdue dans un tourbillon de mots, d’images et de références loin de mon quotidien…

Pour cela, je suis allée voir l’adaptation cinématographique…Le film quoi, le film tiré du bouquin.

Petite hésitation déjà en voyant le Germain de Jean Becker: Depardieu ?! Pff…

Curiosité oblige, je franchis malgré tout la porte de la salle et me voilà partie…Moins loin que je l’aurai aimé.

Entrée en matière trop brutale, performances d’acteurs douteuses, poésie enfuie, flashs back mielleux….Quand l’image s’emmêle, c’est une friche qui n’est plus. Un film trop propret. Un simplet trop intello pour croire à une soudaine découverte de la magie des livres,  une mamie sans brin de folie : ridée mais trop lisse, sympatoche mais trop moraliste, touchante mais finalement un peu chiante…Une Marguerite à laquelle on a enlevé son deuxième  « t » qui faisait pourtant toute la différence.

Autre histoire que celle de Sabine que j’avais laissé m’apprivoiser, cette adaptation ne laisse pas plus de traces qu’un bon Louis la Brocante une soirée de pluie.

Il y a de ces livres qui devraient le rester. Des livres à ne pas rater.

Extraits:

« Margueritte dit que se cultiver, c’est tenter de grimper en haut d’une montagne. (…) Un beau matin, on prend son sac à dos, on commence sa marche. (…) On croyait que le monde s’arrêtait à la colline en face, mais non ! (…) une fois qu’on est tout en haut, on est content (…) seulement au bout d’un moment, on se gaffe d’un truc tout con : c’est qu’on est seul, sans plus personne à qui causer. (…) C’est sans doute à ça qu’elle pense Margueritte quand elle dit (…) que la culture isole. »

« C’est pas parce qu’on est inculte qu’on n’est pas cultivable. Il suffit de tomber sur un bon jardinier. »

La tête en friche, Marie-Sabine Roger, Ed du Rouergue, 2008

La tête en friche, un film de Jean Becker, sortie dans les salles en juin 2010

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2 commentaires pour “La tête en friche loin des têtes d’affiches

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  1. J’ai trouvé les critiques dure avec ce film, moi je l’ai trouvé plutôt pas mal.

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