David Lafore : De la bouche fermée à la mule en passant par la chatte

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Coluche, Brel et Gainsbourg enterrés, Guillon dégagé, Dieudonné placardé…Restent-ils des agitateurs de conscience et autres emmerdeurs de tourner en rond ? C’est la question que s’est posée l’espace Jemmapes en organisant une semaine de l’insolence. Et parmi les sales gueules programmées, celle de David Lafore a retenu notre attention.


Dans la queue, une tronche de vendeur d’aspirateur porte à porte attend. Drôle de mec qui croit encore au col de chemise posé sur un pull premier de la classe. Entrée dans la salle. Le commercial débarque sur le plateau. Merde ! Le vendeur d’aspirateurs…

David Lafore a ôté sa laine. Il s’installe. Soufflerait presque, c’est l’heure du boulot. Faut y aller. Interroge le public d’un regard « mi encrouté du réveil mi-j’vous emmerde ». Puis commence par murmurer dans le micro, jouant le mec gauche, un peu paumé qui sort un mémo pour ambiancer la salle d’un « est ce que vous êtes là ? », prononcé sur le même ton qu’un « file moi les clés de voiture ».

Et David entame son numéro, enchaîne les chansons sur pas grand chose, ou sur l’amour, rendant à chacun sa juste place, enfourne sa mule avant de quitter instruments et micro pour rythmer de ses doigts sa transformation soudaine en petite culotte de coton blanc. Et de conseiller fortement un « cuni pour mamie ».

Plus d’une heure d’échange où le public rit et sait se taire, bercé par une voix claire et envoûtante qui maîtrise à la perfection silences, bruitages, poésie moderne, tralala, sifflotements, susurrements, grognements, miaulements et un tas d’autres trucs en -ent. Envouté par une présence scénique d’autant plus forte que subtile.

Avec ces tacs et tics de langages à la Bobby Lapointe comme dans Jalousie, ces textes à prendre au troisième degré, le dandy tête à claques s’avère être l’impertinent pertinent du moment. Celui qui nous sauve des caravanes et autres miauleries mièvres de la scène française actuelle. Ce que certains arrivent à vendre sans avoir peur d’appeler ça de la musique: trois mots et deux notes, celles de David Lafore dépoussièrent la chanson française qui retrouve sa juste finesse et son audace.

Après un premier album en 2004, le chanteur continue son exploration de la vie et des sentiments dans son deuxième album intitulé sobrement: II , sorti en 2007

Cela donne en vrac: 20 francs (le cunnilingus), un baiser, une bombe, laisse moi mourir un peu,  tu m’en diras tant, fleur de rond point, Babines ou plat à gratin. À savourer.

Certaines restent coincées entre les dents pour que le goût dure en sortant. D’autres se boivent. Sans modération.

Vous vous méfierez des tronches de porte à porte, il se pourrait que ce soit vous qui vous retrouviez à les suivre, de portes en portes.

Jalousie -David Lafore

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